Lettre sur l'Année de la Foi (29.IX.2012)

A l’occasion de l’année de la foi, le Prélat de l’Opus Dei a écrit une Lettre pastorale. Elle fait suite à la Lettre apostolique Porta Fidei dans laquelle Benoit XVI annonçait l’Année de la foi.

Mes très chers enfants, que Jésus vous garde !

1. Nous avons tous éprouvé une grande joie à la parution de la Lettre apostolique Porta fidei , dans laquelle le pape nous annonçait l’ Année de la foi . Benoît XVI n’a pas ménagé ses efforts pour exposer les contenus fondamentaux de l’Évangile, dans un langage accessible aux hommes du XXIe siècle. Et dans cette ligne, pour le cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II, le 11 octobre 2011 il a convoqué une Année de la foi qui commencera le 11 octobre prochain pour se terminer le jour de la solennité de Jésus-Christ, Roi de l’Univers, le 24 novembre 2013. Le début de cette année coïncide d’ailleurs avec le vingtième anniversaire de la constitution apostolique Fidei depositum , par laquelle le bienheureux Jean-Paul II avait ordonné la publication du Catéchisme de l’Église Catholique , un texte d’une valeur extraordinaire pour la formation personnelle et pour la catéchèse que nous devons déployer sans relâche dans tous les milieux.

L’ Année de la foi , c’est donc comme un nouvel appel à chacun des enfants de l’Église à prendre vivement conscience de notre foi, à nous efforcer de mieux la connaître, de la mettre fidèlement en pratique et, en même temps, à nous appliquer à la diffuser, en communiquant son contenu, par le témoignage de notre exemple et de notre parole, aux très nombreuses personnes qui ne connaissent pas Jésus-Christ ou qui ne le fréquentent pas.

Le saint-père souffre du fait qu’un grand nombre de chrétiens, y compris parmi ceux qui se considèrent catholiques, « s’intéressent surtout aux conséquences sociales, culturelles et politiques de leur engagement, continuant à penser la foi comme un présupposé évident du vivre en commun . En effet, ce présupposé non seulement n’est plus tel, mais souvent il est même nié. Alors que dans le passé il était possible de reconnaître un tissu culturel unitaire, largement admis dans son renvoi aux contenus de la foi et aux valeurs inspirées par elle, aujourd’hui il ne semble plus en être ainsi dans de grands secteurs de la société, en raison d’une profonde crise de la foi qui a touché de nombreuses personnes [1].

2. Ces considérations-là ne sont pas nouvelles. Pour paradoxal que cela puisse paraître, depuis la conclusion du Concile Vatican II déjà, l’on entrevoyait le danger que, dans de vastes secteurs de l’Église, l’enthousiasme suscité par cette Assemblée puisse en rester à de simples mots, sans peser en profondeur dans la vie des fidèles ; ou même pire : que, par suite de mauvaises interprétations et applications des enseignements conciliaires, l’authentique esprit chrétien finisse par être assimilé à l’esprit du monde au lieu d’élever le monde à l’ordre surnaturel.

Nous qui avons vécu ces temps-là, nous nous rappelons la douleur avec laquelle Paul VI, le Concile à peine terminé, se plaignait souvent face à la grande crise de la foi, de la discipline, de la liturgie et de l’obéissance qui affectait ces secteurs de l’Église. Saint Josémaria se faisait l’écho de cette préoccupation du saint-père et, dans une lettre adressée à ses enfants, écrite peu avant la clôture du Concile, nous écrivait : « Vous savez avec quel amour j’ai suivi pendant ces quelques années le déroulement du Concile, en y coopérant par ma prière et, plus d’une fois, par mon travail personnel. Vous connaissez également mon désir d’être fidèle, et que vous soyez fidèles aux décisions de la hiérarchie de l’Église jusque dans les moindres détails, en agissant non seulement en sujets d’une autorité, mais avec une piété d’enfants, avec l’affection de ceux qui se sentent et qui sont membres du Corps du Christ. Je ne vous ai pas caché non plus ma souffrance devant le comportement de ceux qui n’ont pas vécu le Concile comme un acte solennel de la vie de l’Église et une manifestation de l’agir surnaturel de l’Esprit Saint, mais comme une occasion d’affirmation personnelle, afin de donner libre cours à leurs propres opinions ou, pis encore, de causer du tort à l’Église. Le Concile est en train de se terminer : on a annoncé à plusieurs reprises que cette session sera la dernière. Quand cette lettre que je vous écris vous parviendra, la période post-conciliaire aura déjà commencé, et mon cœur tremble à la pensée qu’elle puisse donner lieu à de nouvelles blessures dans le corps de l’Église. Les années qui suivent un Concile sont toujours des années importantes, qui exigent docilité pour mettre en application les décisions adoptées, fermeté dans la foi, esprit surnaturel, amour de Dieu et de l’Église de Dieu, fidélité au Souverain Pontife » [2] .

Nul pessimisme dans ces propos de saint Josémaria, mais un désir de souligner qu’alors, comme en toute autre circonstance, on a besoin de femmes et d’hommes habités par la foi.

3. Malgré les efforts du Magistère dans le dernier demi-siècle et malgré le témoignage fidèle d’un grand nombre de personnes, parmi lesquelles des saints, la désorientation s’est répandue progressivement dans le monde entier. Le pape écrit : « Nous ne pouvons accepter que le sel devienne insipide et que la lumière soit tenue cachée (cf. Mt 5, 13-16). Comme la Samaritaine, l’homme d’aujourd’hui peut aussi ressentir de nouveau le besoin de se rendre au puits pour écouter Jésus qui invite à croire en lui et à puiser à sa source, jaillissante d’eau vive (cf. Jn 4, 14). Nous devons retrouver le goût de nous nourrir de la Parole de Dieu, transmise par l’Église de façon fidèle, et du Pain de la vie, offerts en soutien de tous ceux qui sont ses disciples (cf. Jn 6, 51). L’enseignement de Jésus, en effet, résonne encore de nos jours avec la même force : "Travaillez non pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure en vie éternelle" ( Jn 6, 27). L’interrogation posée par tous ceux qui l’écoutaient est la même aussi pour nous aujourd’hui : "Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ?" ( Jn 6, 28). Nous connaissons la réponse de Jésus : "L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu'il a envoyé" ( Jn 6, 29). Croire en Jésus-Christ est donc le chemin pour pouvoir atteindre de façon définitive le salut [3].

4. L’ Année de la foi nous offre une occasion magnifique d’approfondir le trésor divin que nous avons reçu et, avec la grâce de Dieu, diffuser cette vertu en ondes concentriques qui parviendront très loin. Une opportunité incomparable s’offre à nous de donner une forte impulsion à la nouvelle évangélisation dont le monde a besoin, en commençant par une résolution concrète d’améliorer chaque jour notre fréquentation des trois Personnes de la Trinité, nous appuyant précisément sur la foi dont firent preuve Marie et Joseph, que saint Josémaria contempla et admira tellement, afin d’avancer pas à pas dans l’identification avec le Christ, avec la Volonté divine. Si nous désirons remuer les âmes pour qu’elles s’approchent de Dieu, nous devons leur parler avant tout par notre vie de chrétiens.

Nous savons que notre Père tournait constamment son regard vers les Apôtres et vers les premiers chrétiens. Chez les Douze, tout comme dans les plus anciennes communautés d’hommes et de femmes qui ont suivi le Christ, brillait avec force l’assurance de leur foi au Christ et dans ses enseignements. S’appliquant à la tâche, ils ont su scruter les pas du Rédempteur sur les chemins de l’humanité. Comment ne pas penser qu’ils se sont très bien rendu compte de la portée de tous ces moments dans lesquels Jésus-Christ réclamait avec exigence, des malades, des estropiés, et d’eux-mêmes, d’avoir recours à Lui avec foi, pour qu’ils prient ou demandent des grâces avec foi. De même qu’il semble évident qu’ils ont dû garder profondément dans leur âme ce reproche paternel et clair sur leur manque de foi, précisément juste avant que Jésus leur confie d’aller par le monde entier pour porter la Bonne Nouvelle (cf. Mc 16, 14-15).

Il est incontestable, et les témoignages de leur comportement sont merveilleux et très abondants, que les premiers chrétiens étaient conscients qu’il leur fallait eux aussi croire fermement dans la grâce du Ciel pour pouvoir mener à bien le mandat de répandre les enseignements du Maître.

Les Douze, comme tous ces premiers frères et sœurs, ont été conscients que cette vertu tellement sollicitée par le Fils de Dieu, ouvrait le chemin de l’espérance en l’accomplissement du plan rédempteur. Et en même temps, leur amour et leur reconnaissance envers le Dieu Un et Trine sont devenus chaque jour plus solide, plus apostoliques. Autrement dit, ils sont devenus capables eux aussi d’entraîner vers la Vérité des personnes de tous les milieux et de toute profession.

5. Mes filles et mes fils, de nos jours il arrive de même car – comme nous le répétait saint Josémaria – les moyens sont les mêmes : l’Évangile —vécu !— et le Crucifix.

Proclamons à tout instant que le fait de redécouvrir la joie et l’assurance de la foi est une obligation qui incombe à l’Église universelle, à toute l’Église. Par conséquent, ce n’est pas seulement la tâche des pasteurs, mais celle de tous les fidèles. Il est normal que les pasteurs marchent devant nous, par leur exemple et leurs exhortations, comme le pape l’écrit dans le motu proprio par lequel il a convoqué ce temps spécial dans l’Église ; mais il invite tout le monde à assumer cette exigence de transmettre aux autres le trésor de la prédication de Jésus-Christ.

La Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dans une note du 6 janvier dernier, conseille aux évêques de consacrer une lettre pastorale sur ce sujet, en tenant compte des circonstances spécifiques des fidèles qui leur ont été confiés [4] . C’est ce que je me suis proposé de faire dans ces lignes, qui n’ont d’autre finalité que d’encourager chacun, de son côté et aussi en communion avec les autres, à admirer de nouveau la beauté de cette foi qu’il a reçue de Dieu, à la mettre en pratique dans son existence personnelle à la diffuser sans respect humain.

Ce même document du pape affirme également que « les saints et les bienheureux sont les authentiques témoins de la foi » [5] . Pour ce motif, il recommande aux Pasteurs de s’efforcer de faire connaître la vie et la doctrine de nombreux saints. Dès lors, quoi de plus normal que, dans ces pages, je m’inspire souvent des enseignements écrits et oraux de saint Josémaria, le très aimé fondateur de l’Opus Dei ; un saint qui nous a montré, par les fruits qu’il a produits, à quel point il a mis sa confiance totale en Dieu.

BESOIN D’UNE NOUVELLE ÉVANGELISATION

6. Bien que de nombreuses personnes ne soient pas conscientes de ce profond besoin de leur âme, l’humanité a cheminé et cheminera toujours, aujourd’hui encore, assoiffée de la parole et de la connaissance de Dieu, même si nombreux sont ceux qui n’ont pas conscience de ce besoin de leur âme. Et c’est à nous qui avons reçu du Seigneur le don de la foi que revient le devoir de nous réveiller et de réveiller ceux qui sont plongés dans ce sommeil d’inefficacité et de mort. L’ Année de la foi , qui commence dans le cadre de l’Assemblée du Synode des évêques consacrée à la nouvelle évangélisation, constitue un nouveau stimulus pour tous. Le moment est venu de hâter le pas, comme le font les sportifs dans les courses lorsqu’ils approchent de la ligne d’arrivée.

Je garde très vivement en mémoire la manière dont le Vénérable Serviteur de Dieu Álvaro del Portillo nous encourageait à prendre notre part personnelle à la tâche de la nouvelle évangélisation. À Noël 1985, il écrivit déjà une lettre pastorale contenant des suggestions pour collaborer avec plus d’intensité à la rechristianisation de certains pays dans lesquels apparaissait plus clairement un affaiblissement progressif de la vie chrétienne. Il mettait en garde contre le nouveau paganisme qui se répandait à partir des nations les plus développées du point de vue économique, et qui, observait-il, se caractérisait, comme c’est le cas aujourd’hui, « par une recherche du bien-être matériel à tout prix, avec par voie de conséquence l’oubli – mieux vaudrait dire la peur, l’authentique effroi – de tout ce qui pourrait être cause de souffrance » [6].

À cette immense tâche apostolique s’est ajouté le besoin d’aider aussi les peuples et sociétés de l’Europe centrale et orientale qui, pendant des décennies, ont été soumis au joug du matérialisme communiste, et qui, par leur martyre prolongé et silencieux, nous ont soutenu, nous autres, dans la liberté.

Nous devons renouveler chaque jour notre désir de placer le Christ au sommet et au cœur des réalités humaines. Pour ce faire, il nous faut croître dans la fréquentation personnelle de Dieu et dans notre don aux autres, en contribuant, par le petit grain de sable qu’est notre don quotidien et total — à la construction d’un monde renouvelé par la grâce et par le sel de l’Évangile, comme le Christ l’a demandé à ses disciples. S’il arrivait que, en constatant que les fruits de nos efforts ne se voient pas tout de suite, le pessimisme cherche à s’emparer de notre âme, nous devrions alors rejeter loin de nous une telle désespérance car ce n’est pas nous, qui sommes si peu de chose, si pleins de défauts, qui menons à bien les plans divins. Les différents péricopes de l’Écriture, dans bien des endroits, nous confirment que inter medium montium pertransibunt aquae ( Ps 13/14, 10). Cette certitude balaye le moindre soupçon de découragement, même si les obstacles atteignent parfois des sommets. Et c’est bien là le chemin opportun pour que nous parvenions jusqu’au Ciel, assurés que nous sommes que les eaux divines essuient et transcendent toutes nos limites pour nous faire arriver près de Dieu.

7. Je me souviens maintenant de quelques mots que saint Josémaria écrivit peu avant son départ à la maison céleste. Voyant la crise de la foi, des vertus et des valeurs qui déjà à l’époque — c’était en 1973 —, s’était déclenchée dans bien des milieux, il s’écriait, poussé par son sens surnaturel et son zèle apostolique : « Dans les moments de crise profonde dans l’histoire de l’Église, peu nombreux ont été ceux qui non seulement sont restés fidèles, mais qui ont eu en plus la préparation spirituelle et doctrinale , ainsi que les ressorts moraux et intellectuels suffisants pour pouvoir opposer une résistance résolue aux agents du mal. Mais ce petit nombre a, de nouveau, comblé de lumière l’Église et le monde » [7] . Nous devons veiller à ce que de nombreuses femmes et de nombreux hommes accueillent la vie de la grâce, et qu’ils s’abritent et se fortifient dans ce refuge.

La nouvelle évangélisation semble spécialement urgente en Europe et dans les pays les plus développés. Dans son exhortation apostolique Ecclesia in Europa , le bienheureux Jean-Paul II évoquait la situation religieuse de la société dans le vieux continent. Si elle avait pour but de reprendre les conclusions de l’Assemblée spéciale du Synode des évêques de l’Europe, ses conclusions pouvaient cependant concerner largement bien d’autres endroits. En effet, après vingt siècles, même dans les pays de grande tradition chrétienne « grandit le nombre des personnes non-baptisées, soit à cause de la notable présence d’émigrants appartenant à d’autres religions, soit du fait que même des enfants de familles traditionnellement chrétiennes n’ont pas reçu le baptême » [8] . La conclusion du pape précisait que, « de fait, l’Europe fait maintenant partie de ces endroits traditionnellement chrétiens dans lesquels, outre une nouvelle évangélisation, s’impose dans certains cas une première évangélisation » [9] . Première évangélisation et nouvelle évangélisation : deux formes d’annonce de l’Évangile que la situation de l’Église et du monde exige de nous.

8. La réalité du missionnaire – avec mission – sans t’appeler missionnaire , dont parle saint Josémaria dans le point 848 de Chemin , se situe précisément dans le moment radical et fondamental de la mission — comme mon Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ( Jn 20, 21) — qui configurera les formes historiques que la mission du Christ prendra dans la vie de l’Église : depuis le soin de la vie de foi des catholiques (la pastorale et la fraternité) jusqu’à la proclamation du Christ Sauveur aux païens (la première annonce ou évangélisation) ; depuis la fréquentation fraternelle des chrétiens non-catholiques pour les encourager à la pleine communion (l’œcuménisme) jusqu’à la nouvelle annonce du Christ et de sa doctrine aux baptisés qui se sont éloignés et qui rejettent sa doctrine (la nouvelle évangélisation). Nous tous, les fidèles de l’Opus Dei, forts d’une sécularité plénière, nous nous sentons appelés à assumer ces différentes dimensions de la « mission » unique de l’Église.

San Josémaria le répétait avec insistance : Nous sommes des missionnaires, avec une mission, sans nous appeler des missionnaires. Missionnaires, autant dans les rues goudronnées de Rome, de New York, de Paris, de Mexico, de Tokyo, de Buenos Aires, de Lisbonne ou de Madrid, de Dublin ou de Sydney, qu’au cœur de l’Afrique [10] . La nécessité de communiquer la première annonce de la foi ne se limite pas aux pays connus traditionnellement comme des terres de mission , mais elle concerne malheureusement toute la planète. Et c’est à cette tâche que nous devons nous atteler.

Mais cette responsabilité ne peut en rester à de simples considérations. Chacune, chacun doit penser : et moi, comment est-ce que j’y contribue ? Et même auparavant, nous devons réfléchir à la façon dont la foi influe sur notre conduite, et aussi à notre gratitude quotidienne pour ce don et, par voie de conséquence, à voir si nous cherchons à transmettre aux autres un si grand trésor. Élevons notre âme vers le Seigneur, en l’implorant : adauge nobis fidem ( Lc 17, 5) pour que nous priions tous mieux ; adauge mihi fidem pour que je travaille en me sanctifiant et en sanctifiant les autres ; pour que je donne constamment à l’amitié un sens chrétien. N’oublions pas le dicton qui dit que l’exemple est le meilleur des sermons, à la suite de Jésus qui coepit facere et docere (cf. Act 1, 1), qui a commencé à faire puis à enseigner.

Soyons persuadés que, dans les endroits les plus divers, « une nouvelle annonce, même aux baptisés, est nécessaire . Nombre (…) de nos contemporains croient savoir ce qu’est le christianisme, mais ils ne le connaissent pas en réalité. L’on est arrivé à ignorer jusqu’aux éléments et les notions fondamentales de la foi » [11] . Et nous devons faire face à ce défi par notre vie et par notre formation doctrinale. Sans pessimisme, nous allons considérer que la mission apostolique, à laquelle le Seigneur pousse les chrétiens qui se savent enfants de Dieu, acquiert de nos jours des tonalités différentes, selon les circonstances de l’ambiance, du lieu, des personnes que chacune ou chacun rencontre. Dans tous les cas, nous avons à mettre en contact avec le Christ ceux et celles qui nous entourent ou que nous fréquentons, en leur faisant connaître ou reconnaître le visage de notre Rédempteur, en les aidant à cheminer à sa suite, même s’ils devaient marcher à contre-courant.

9. Quelle grande tâche nous attend ! Par notre désir personnel de sainteté, humblement, nous devons toucher les gens, avant tout par notre exemple. Soyons conscients que notre effort pour vivre en chrétiens cohérents, en dépit de nos misères personnelles, participe de cette lumière que le Seigneur désire allumer dans le monde. N’ayons pas peur de heurter le conformisme ambiant, sur les points qui sont incompatibles avec la foi catholique, même si cette attitude peut nous attirer des préjudices matériels ou sociaux : Soyez convaincus, et propagez chez les autres cette conviction que nous autres chrétiens, nous devons naviguer à contre-courant. Ne vous laissez emporter par de fausses illusions. Réfléchissez-y : Jésus a vécu à contre-courant ; à contre-courant ont cheminé Pierre et les autres disciples, et tous ceux qui, le long des siècles, ont voulu être de fidèles disciples du Maître. Ayez donc la ferme certitude que ce n’est pas la doctrine de Jésus qui doit s’adapter aux temps, mais que ce sont les temps qui doivent s’ouvrir à la lumière du Sauveur [12] .

C’est pourquoi, tout en tournant notre regard vers le Rédempteur, en lui demandant de nous accorder la paix et la capacité de pardonner et d’aimer tous ceux qui promeuvent ces incompréhensions, prions avec obstination pour ceux qui prétendent obstinément clouer au pilori l’Église, la hiérarchie, les catholiques. Bien conscients de notre faiblesse personnelle, cherchons sans relâche à rendre le bien pour le mal ; et, conséquence de notre union à Dieu, aimons ceux qui essaient de persécuter ou de réduire la religion aux sacristies, au seul domaine privé.

D’un autre côté, si les respects humains ne doivent pas ralentir les élans apostoliques, la considération réaliste de notre faiblesse personnelle ou du manque de moyens le feront moins encore, car nous ne nous appuyons pas sur nos forces mais bien sur la grâce de Dieu : omnia possum in eo, qui me confortat ( Phil 4, 13). À ce sujet, le fondateur de l’Opus Dei commentait : Demeurons tous unis dans la prière : voilà (…) l’origine de notre joie, de notre paix, de notre sérénité et, par conséquent de notre efficacité surnaturelle [13] . Et ailleurs, il ajoutait : Voulez-vous d’autres conseils encore ? Eh bien, les procédés qu’ont toujours utilisé les chrétiens qui aspiraient à vraiment suivre le Christ, les mêmes qu’ont utilisés les premiers chrétiens qui ont de si près suivi Jésus ; à savoir la fréquentation assidue du Seigneur dans l’Eucharistie, l’invocation filiale de la très Sainte Vierge, l’humilité, la tempérance, la mortification des sens (…) et la pénitence [14] ; une foi solide, bien assise dans le Seigneur Tout-puissant. Il nous est bien difficile d’expliquer l’optimisme et la fermeté de saint Josémaria, qui a toujours été stimulé, entre autres textes, par les mots du Psaume : in lumine tuo videbimus lumen ( Ps 36/36, 10), car, avec Lui, se dissipent toutes les ténèbres.

REVENIR AUX RACINES DE L’ÉVANGILE

10. Bien souvent, l’Europe a dû, par le passé, faire face à des périodes difficiles de transformation et de crise, mais « elle les a toujours surmontées, en tirant une nouvelle sève de l’inépuisable réserve d’énergie vitale de l’Évangile » [15] . Ces paroles du bienheureux Jean-Paul II, prononcées en 1995, nous confirment sur le chemin qu’il faut toujours suivre. Il n’y en a pas d’autre. Nous devons nous nourrir aux racines de notre foi pour nous imprégner de la sève vivifiante qu’elles nous obtiennent (et c’est bien le but recherché par la formation doctrinale que nous fournit l’Œuvre), et à partir de là mettre partout les hommes et les femmes en contact vital avec le Christ.

Saint Josémaria soutenait que « vivre sa foi c’est aussi la transmettre aux autres ». Pour y parvenir, il faut cheminer avec eux. Et chemin faisant, il faut écouter les difficultés qu’ils rencontrent face au message chrétien, les comprendre et leur montrer que nous les comprenons, de façon à ce qu’ils se sentent compris et éclairés par les échanges qu’ils ont avec nous, et qui peuvent les orienter ; et leur communiquer l’Évangile, la parole vivante du Seigneur, cheminant ainsi avec elles ou avec eux, avec affection et amabilité. En d’autres mots, leur montrer la merveille de l’esprit chrétien, qui harmonise la raison et la foi, et qui offre une réponse à toutes les interrogations et apaise les inquiétudes des cœurs humains. Nous les préparons ainsi progressivement à désirer les sacrements et à se disposer à bien les recevoir.

Dans bien des cas, la grâce divine devra bâtir dans les âmes l’édifice surnaturel à partir des fondations elles-mêmes. Appuyons-nous sur ces désirs de faire du bien et d’être solidaires qui caractérisent les nouvelles générations – et pas uniquement elles –, afin qu’elles découvrent le Sauveur ; annonçons-leur la doctrine avec don des langues et sur ces bases, petit à petit, suivons un plan incliné jusqu’à ce qu’elles acquièrent une vie chrétienne consistante.

L’exemple des premiers chrétiens

11. J’insiste sur le fait qu’il nous faut souvent revenir à la considération du comportement des Apôtres et de nos premiers frères et sœurs dans la foi. Ils étaient peu nombreux, ils manquaient de moyens humains, ils ne comptaient pas parmi eux, au moins pendant longtemps, de penseurs ou de gens influents dans la société. Ils évoluaient dans un milieu social marqué par l’indifférentisme, dépourvu de valeurs, semblable à bien des points de vue à celui dans lequel nous vivons. Ils n’en ont pas été effrayés pour autant. « Ils ont maintenu des échanges merveilleux avec toutes les personnes qu’ils rencontraient, qu’ils ont recherchées, lors de leurs voyages et pérégrinations. L’Église n’existerait pas si les Apôtres n’avaient pas maintenu ce dialogue surnaturel avec toutes ces âmes-là » [16] . Des femmes et des hommes, leurs contemporains, ont fait l’expérience d’une profonde transformation lorsqu’ils étaient touchés par la grâce divine. Ils n’ont pas simplement adhéré à une nouvelle religion, plus parfaite que celles dont ils avaient connaissance, mais ils ont découvert par la foi Jésus-Christ, ils sont devenus amoureux de Lui, le Dieu-Homme qui s’était livré en sacrifice pour eux et qui était ressuscité pour leur ouvrir les portes du Ciel. Ce fait inouï a pénétré avec une grande force dans les âmes de ces premiers, en leur transmettant une solidité à toute épreuve. « Personne n’a cru à la parole de Socrate au point de vouloir mourir pour sa doctrine ; et le Christ (…) a trouvé dociles à sa parole, non pas seulement les ignorants et les gens du peuple, mais les savants et les philosophes, qui pour lui ont méprisé la gloire et la crainte de la mort » [17].

Dans un monde qui désirait ardemment son salut, sans savoir où le trouver, la doctrine chrétienne s’est frayé un passage comme la lumière allumée au milieu de l’obscurité. Par leur comportement les premiers chrétiens ont su faire briller face à leurs concitoyens cette clarté salvatrice et sont devenus, sans attirer le regard, sans attitudes spectaculaires, des messagers du Christ, simplement, avec naturel, par la cohérence de leur foi et leurs œuvres. « Nous ne disons pas de grandes choses, mais nous les faisons » [18] , écrivit l’un d’eux. Et ils ont transformé le monde païen.

Dans la Lettre apostolique qu’il adressa à l’Église tout entière, pour la préparation du grand jubilé de l’an 2000, le bienheureux Jean-Paul II expliquait que « Dans le Christ, la religion n'est plus une « recherche de Dieu comme à tâtons » (cf. Ac 17, 27), mais une réponse de la foi à Dieu qui se révèle : réponse dans laquelle l'homme parle à Dieu comme à son Créateur et Père; réponse rendue possible par cet Homme unique qui est en même temps le Verbe consubstantiel au Père, en qui Dieu parle à tout homme et en qui tout homme est rendu capable de répondre à Dieu » [19].

C’est une question de foi

12. Je vois dans ces mots une autre considération que je souhaiterais vous proposer, en considérant le besoin de nous atteler sans trêve à la tâche de la nouvelle évangélisation de la société. Nous avons avant tout besoin d’une foi et d’une espérance fermement assumées. Nous voulons dire que nous devons approfondir à chaque instant notre intime conviction, née de notre fréquentation de la Trinité, qu’il est possible de changer le cap de ce monde qui est le nôtre, de le réorienter vers la gloire du Seigneur et vers la conversion des âmes toutes les activités humaines. Les luttes ni les souffrances ne nous seront certes pas épargnées, mais nous avancerons in lætitia , dans la joie et la confiance, car nous sommes assistés de la promesse divine : demande-moi et je te donnerai les nations en héritage, les extrémités de la terre pour possession ( Ps 2, 8).

Il est impressionnant de contempler les Apôtres qui, je vous le répète, sans autre moyen que la foi au Christ, poussés par une espérance ferme et joyeuse, se dispersent sur la terre alors connue et diffusent la doctrine chrétienne partout. Saint Josémaria se réjouissait de célébrer leur mémoire liturgique, comme celle des saintes femmes qui ont accompagné Jésus dans ses itinérances sur terre ! Les figures des Apôtres, de Marie Madeleine, de Lazare, de Marthe et Marie, les sœurs de Lazare le comblaient d’enthousiasme. De chacun, de chacune d’entre eux nous pouvons apprendre à croire à croire davantage et totalement en Jésus-Christ, et à l’aimer avec l’intensité de ceux qui l’ont côtoyé. Ils devaient se considérer, tout comme nous, remplis de misères et pourtant, malgré leur petit nombre par rapport à la population des nations connues, ils ont répandu la semence divine par leur exemple et leur parole réconfortante.

Je me rappelle la force avec laquelle notre Père assurait, au sujet de l’apostolat dans les milieux difficiles : C’est une question de foi ! Oui, c’est une question de foi ! De cette foi qui a la capacité, nous fait remarquer le Seigneur dans l’Évangile, de déplacer les montagnes (cf. Mt 17, 20) et de surmonter tout obstacle ; qui est pareille aux fleuves qui se fraient un passage jusqu’à la mer depuis les rochers élevés (cf. Ps 103/104, 10). C’est ainsi que je vous demande et me demande : avec quelle foi agissons-nous dans notre apostolat, en sachant qu’il est toujours le moment d’en faire ? Sommes-nous véritablement convaincus que, comme l’écrit saint Jean, la victoire qui triomphe du monde, c'est notre foi ( I Jn 5, 4) ? Agissons-nous avec cette conviction ? Faisons-nous face, avec un esprit optimiste, avec un moral victorieux, aux obstacles qui se dressent ? Et pour y parvenir, nous appuyons-nous par la prière et le sacrifice chaque activité apostolique concrète ? Rendons-nous le témoignage de notre foi, sans que les difficultés de l’ambiance nous effraient ?

Répétons plus souvent au Seigneur : je crois, Seigneur, mais viens en aide à mon manque de foi ( Mc 9, 24). La requête de ce père d’un enfant lunatique touchait profondément saint Josémaria. Ne nous contentons pas de notre façon d’implorer du Seigneur les vertus théologales. Conscient que la foi est un don surnaturel que seul Dieu peut infuser et intensifier dans notre âme, saint Josémaria disait un jour : Tous les jours, non pas une fois mais à de nombreuses reprises, je le lui redis (…). Je lui dirai quelque chose que les Apôtres lui demandaient (…) : adauge nobis fidem ! (Lc 17, 5), augmente en nous la foi. Et j’ajouterai : spem, caritatem ; augmente en nous la foi, espérance et la charité [20].

Un solide point d’appui

13. Le saint-père Benoît XVI a relevé à plusieurs reprises les contradictions du temps qui est le nôtre. « Dans de vastes parties du monde, il existe aujourd'hui un étrange oubli de Dieu. Il semble que rien ne change même s'il n'est pas là. Mais, en même temps, il existe aussi un sentiment de frustration, d'insatisfaction de tout et de tous. On ne peut alors que s'exclamer: il n'est pas possible que ce soit cela la vie! Non vraiment. Et alors conjointement à l'oubli de Dieu, il existe comme un "boom" du religieux. Je ne veux pas discréditer tout ce qu'il y a dans cette tendance. Il peut y avoir aussi la joie sincère de la découverte. Mais dans ce contexte, la religion devient presque un produit de consommation. On choisit ce qui plaît, et certains savent aussi en tirer un profit. Mais la religion recherchée comme une sorte de "bricolage", en fin de compte ne nous aide pas. Elle est commode, mais dans les moments de crise, elle nous abandonne à nous-mêmes » [21] . Et le pape conclut avec cette invitation : Aidez les hommes à découvrir la véritable étoile qui nous indique la route: Jésus-Christ ! [22]

Malgré le climat de relativisme et de permissivité dominant dans bien des couches de la société, de nombreuses personnes sont assoiffées d’éternité, après avoir cherché peut-être inutilement d’assouvir leur soif dans des choses périssables. Ô combien grande est la vérité contenue dans les mots bien connus de saint Augustin : « « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi » ! [23] . Effectivement, Dieu seul satisfait complètement les aspirations de l’esprit humain. Soyons, par conséquent, des femmes et des hommes d’une ferme piété, accourons aux divers modes de prière – le seul vrai déversoir – avec de sincères désirs de devenir davantage priants. Approchons-nous de la messe avec une foi profonde, persuadés que le Sacrifice du Calvaire devient sacramentellement présent, ce Sacrifice qui nous apporta le salut et qui nous revitalise pour le combat de chaque jour vers la sainteté.

14. La foi, la piété et le recueillement avec lesquels saint Josémaria pénétrait, corps et âme, dans le temps de la Consécration eucharistique causaient une profonde impression autour de lui. Il s’émerveillait chaque jour, avec une gratitude renouvelée et une nouvelle dévotion face au mystère de la transsubstantiation, devant le don fait au Père du Fils de Dieu avec l’Esprit Saint pour le salut des âmes. Je pense que je n’exagère pas en affirmant que c’est de la conscience qu’il avait d’être en ces moments-là ipse Christus , qu’il tirait toute la force de son efficacité et de sa très vaste action apostolique. Et nous, nous le contemplions avec cette même foi ardente lorsqu’il répétait, avant d’administrer la sainte Communion les mots de Jean-Baptiste : ecce agnus Dei ! Il exhortait tous les catholiques, et aussi ses filles et à ses fils, et les prêtres à la nécessité de s’identifier au Christ, car c’est lui qui nous y a invités et parce qu’en le faisant nous attirerons les âmes vers l’Amour de Dieu. Le fait d’actualiser notre foi, comme le faisait notre Père, précisément au moment de la transsubstantiation, nous aide puissamment à convertir chacune de nos journées en une messe.

Cette certitude que Dieu veut compter sur nous peut et doit constituer un ferme point d’appui qui nous aide à renouveler chaque jour notre élan apostolique. Ce doit être une impulsion qui, nous comblant d’espérance et d’optimisme surnaturels, nous entraîne au service des personnes qui passent à nos côtés : « Nous devons nous enflammer du désir et de la volonté réelle de porter la lumière du Christ, le désir du Christ, les douleurs et le salut du Christ, à tant d’âmes de nos collègues, de nos amis, de nos parents et connaissances, quelles que soient leurs opinions sur les affaires de la terre, pour leur donner à tous une bonne accolade fraternelle. Nous serons alors comme un rubis enflammé, qui ne sera plus ce pauvre charbon misérable, ce néant, mais la voix de Dieu, la lumière de Dieu, le feu de la Pentecôte ! » [24].

QUELQUES DOMAINES D'ACTION PRIORITAIRES

15. S’il est un apostolat qu'il faudra toujours réaliser avec profondeur, partout dans le monde, c’est bien l'apostolat de l'intelligence. Il s'agit de « communiquer » sur la vérité pour « communiquer » la Vérité. C'est ce qui définit, au bout du compte, toute l’entreprise apostolique. Ne nous lassons jamais de demander à Dieu – avec humilité, mais en insistant avec confiance – d’ouvrir les intelligences et les cœurs à sa lumière. Beaucoup de gens pourraient répéter avec les Rois Mages : nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus l'adorer ( Mt 2,2). C’est ce qu’on nous dira, à nous qui croyons au Christ, si nous abordons tout le monde avec des sentiments d’amitié sincère, imprégnés de charité, de compréhension, de sympathie humaine, que renforcera notre vie de piété. Allons également vers tous en manifestant notre reconnaissance pour le bien que tant de personnes réalisent dans une multitude de domaines.

Benoît XVI commente que ce qui émerveille dans l'attitude des Rois Mages « c’est que ces derniers se prosternèrent en adoration devant un petit enfant dans les bras de sa mère, non pas dans le cadre d'un palais royal, mais dans la pauvreté d'une bergerie à Bethléem (cf. Mt 2, 11). Comment cela a-t-il été possible? Qu'est-ce qui a convaincu les Rois Mages que cet enfant était "le roi des Juifs" et le roi des peuples? Ils ont certainement été persuadés par le signe de l'étoile, qu'ils avaient vu "se lever" et qui s'était arrêtée précisément sur le lieu où se trouvait l'Enfant (cf. Mt 2, 9). Mais même l'étoile n'aurait pas suffi si les Rois Mages n'avaient pas été des personnes profondément ouvertes à la vérité. À la différence du roi Hérode, absorbé par son intérêt pour le pouvoir et la richesse, les Rois Mages étaient tendus vers l'objectif de leur recherche, et lorsqu'ils la trouvèrent, bien qu'ils fussent des hommes cultivés, ils se comportèrent comme les bergers de Bethléem : ils reconnurent le signe et adorèrent l'Enfant, en lui offrant les dons précieux et symboliques qu'ils avaient apportés avec eux » [25].

N'oublions pas que « Notre Seigneur s'adresse à tous les hommes pour qu'ils viennent à sa rencontre, pour qu'ils soient saints. Il n'appelle pas seulement les Rois Mages, sages et puissants ; auparavant, il avait déjà envoyé aux bergers de Bethléem non pas une étoile, mais l'un de ses anges. Mais tous, les pauvres et les riches, ceux qui sont savants et ceux qui le sont moins, doivent disposer leur âme à écouter avec humilité la voix de Dieu » [26].

16. La tâche d’éclairer les intelligences n'incombe pas seulement à ceux qui exercent leur activité professionnelle dans des domaines particulièrement qualifiés. L'apostolat personnel de chaque chrétien dans le milieu dans lequel il vit habituellement sera toujours d'une grande efficacité. Par conséquent, je vous propose de nous arrêter un instant pour faire un examen très personnel sur la façon dont nous essayons d'aider les âmes à s’approcher de Dieu. Comment prions-nous ? Quels sacrifices réalisons-nous ? Combien d'heures de travail bien fait offrons-nous ? Quel dialogue, oral ou écrit, entretenons-nous avec nos amis, nos parents, nos collègues, nos connaissances ? Propageons autour de nous cette sainte préoccupation, car la foi en l'efficacité des enseignements du Christ doit nous inciter à servir et à aimer davantage nos frères et sœurs : personne ne doit nous laisser indifférent.

L'apostolat de l'intelligence, je le répète, est l'affaire de tous. Toutefois, et sans perdre de vue les nombreux domaines qu'il est urgent d'évangéliser, il est aujourd'hui devenu prioritaire d'imprégner de la doctrine du Christ quelques milieux particuliers . Pour s'en rendre compte, il suffit de penser aux tâches que doivent accomplir ceux qui gouvernent, ceux qui œuvrent dans la recherche scientifique, ceux qui forgent l'opinion publique, etc. ; sans oublier que toutes et tous ressentent – comme nous – la nécessité d'écouter la voix du Seigneur et de la suivre.

« Le combat pour l’âme du monde contemporain est à son apogée là où l’esprit du monde semble le plus puissant », écrivait le bienheureux Jean-Paul II. Cela, écrivait-il, à cause de l’existence « d'"aréopages modernes", c'est-à-dire de nouvelles autorités intellectuelles. Ces aréopages sont aujourd'hui le monde de la science, de la culture, des moyens de communication. Ce sont les milieux où se forment les élites intellectuelles, c’est la sphère des écrivains et des artistes » [27].

La recherche et l'enseignement

17. Bien que nous devions toujours nous adresser à tous, il est évident que faire connaître l'Évangile aux personnes qui évoluent dans des milieux intellectuels revêt une importance particulière. Concrètement, ceux qui travaillent dans des institutions universitaires doivent se rappeler ces mots du Seigneur, qui sont adressés à tous, mais qui les concernent particulièrement : vos estis lux mundi ( Mt 5, 14), vous êtes la lumière du monde. En effet, leur travail professionnel les place à l'avant-garde de la nouvelle évangélisation Saint Josémaria, qui a tant stimulé – y compris avant 1928 – l’apostolat auprès des intellectuels, écrivait : « L’Université a pour mission la plus élevée d'être au service des hommes, d'être le ferment de la société dans laquelle elle est insérée » [28].

Ces paroles montrent très bien la direction que doivent emprunter ceux qui veulent faire de l'apostolat dans ces milieux : ils doivent être lumière et chaleur – la lumière et la chaleur de l'Évangile – pour que leurs amis, leurs collègues, leurs élèves, imprègnent leur être et leur agir de la Bonne Nouvelle du Christ, dans une pleine fidélité au Magistère de l'Église. De cette façon, ils contribueront à l'évangélisation de la culture. Ce point de Chemin est d’une actualité permanente : « L’amour de Dieu et le zèle pour les âmes, tu dois les communiquer à d’autres, pour qu’à leur tour ils transmettent la flamme à d’autres, encore plus nombreux, qui forment un deuxième cercle et chacun de ceux-ci, à ses collègues de travail. Il t’en faut des calories spirituelles ! — Quelle responsabilité si tu te refroidissais ! Et (je ne veux pas y penser) quel horrible crime si tu donnais le mauvais exemple ! » [29].

Qu’il ne soit pas dit qu'ait été lancé en vain ce défi : inciter beaucoup de personnes et d'institutions, partout dans le monde, à promouvoir - en s'inspirant de l'exemple des premiers chrétiens – une nouvelle culture, une nouvelle législation, un renouvellement du secteur de la mode, qui soient cohérents avec la dignité de la personne humaine et sa fin ultime, qui est de participer à la gloire des enfants de Dieu (cf. 2 Cor 3, 18). Nous devons tous prier et agir avec générosité pour atteindre cet objectif. Toutefois, il est de la responsabilité particulière des professeurs d'université et des chercheurs d'y travailler avec acharnement, en profitant de toutes les occasions que l'exercice de leur profession leur offrira. Dans ce contexte-là, la foi constitue un appui pour avancer vers la vérité quand, par la force même de la vertu, nous nous efforçons de la diffuser dans tous les milieux et quand nous aidons ceux de notre entourage à la recevoir ou à l’intensifier.

18. La recherche occupe une place éminente dans l'activité des universitaires et des autres intellectuels. Par ce travail d'investigation, le chrétien qui cherche et diffuse la vérité, animé par un désir légitime de participer à l'élaboration d'un savoir qui ne soit pas fragmentaire, non relativiste, a de multiples occasions de réaliser un apostolat doctrinal profond. Aucun thème de recherche, aucun aspect du vaste domaine l'enseignement, n’est neutre du point de vue de la foi. Toutes nos activités, même un cours de chimie – pour utiliser un exemple très parlant – peuvent servir ou non à étendre le Règne du Christ. « La nécessaire objectivité scientifique écarte justement toute neutralité idéologique, toute ambiguïté, tout conformisme, toute lâcheté : l'amour de la vérité engage la vie et le travail du scientifique dans leur intégralité » [30] . Si le professeur, si le chercheur est principalement animé par le désir de rendre gloire à Dieu et de servir les âmes, alors la cohérence de son exemple de vie chrétienne, la disponibilité dont il fera preuve envers ses élèves et ses collaborateurs, la droiture avec laquelle il réalisera son travail, le zèle avec lequel il formera ses disciples, auxquels il transmettra son savoir, contribueront indubitablement à ce que ceux qui l'écoutent ou entendent parler de son travail découvrent les nouveaux horizons ouverts par ceux qui suivent le Christ.

Par ailleurs, ces activités scientifiques permettent à chacun d'établir, dans son propre pays comme à l’étranger, des relations professionnelles avec des chercheurs renommés. Elles font naître des amitiés sincères, qui favorisent l'apostolat personnel. Ainsi, ces collègues comprennent mieux les raisons d’appliquer ne serait-ce que les critères fondamentaux de la morale à leur activité de recherche.

Les catholiques responsables qui évoluent dans ces milieux cruciaux pour la nouvelle évangélisation, devraient se demander comment faire entendre leur voix, dans la mesure de leur possibilité, dans les moyens de communication et les lieux d'expression et de débat. Qu’ils aient le souci de transmettre une bonne et saine doctrine dans les matières touchant à leur spécialité. À cette fin, ils peuvent collaborer avec la presse, intervenir dans des programmes de télévision ou de radio, ou encore sur internet. Ils peuvent également participer à des activités culturelles, en donnant un avis scientifique crédible dans les débats qui agitent l’opinion publique, etc. Dans le même temps, les catholiques qui dirigent des entreprises de communication et d'information, où qui y travaillent, doivent s'efforcer de présenter avec rigueur et hauteur de vue ce qui se fait de bon et de juste dans ces domaines.

Je voudrais qu'il soit bien clair que ceux qui évoluent dans ces secteurs soient suffisamment responsables pour tirer profit de leurs talents comme il convient. Qu'ils n'oublient pas que bien d'autres personnes, qui ont un travail apparemment peu prestigieux, s'efforcent d'offrir leurs activités quotidiennes à Dieu pour que les hommes et les femmes qui peuvent influencer la société agissent avec un grand sens de leurs responsabilités, et qu’ils soient conscients que Dieu leur demandera compte des dons qu'ils ont reçus. Qu'ils se montrent aussi très reconnaissants envers ceux qui travaillent, pour ainsi dire, dans la pénombre. Saint Josémaria disait quelque chose de très pertinent à ce sujet : « Qui est le plus important : le recteur d'une Université ou le dernier des ouvriers qui s'occupe de la maintenance du bâtiment ? » Il répondait sans hésiter : Celui qui accomplit son travail avec foi, celui qui désire le plus la sainteté . »

Harmonie entre foi et raison

19. Ceux qui se savent enfants de Dieu doivent affirmer qu'« il ne peut y avoir aucun conflit entre la raison et la foi : l'une s'intègre à l'autre, et chacune a son propre champ d'action […] Dans leurs mondes respectifs, Dieu et l'homme se trouvent dans une relation unique. En Dieu réside l'origine de toutes choses, en lui se trouve la plénitude du mystère, et cela constitue sa gloire ; il incombe à l'homme le devoir de rechercher la vérité par sa raison, et en cela consiste sa noblesse » [31].

Le panorama que saint Josémaria nous découvrait est toujours pleinement actuel : « Nous devons montrer, en nous appuyant sur des connaissances scientifiques sérieuses, qu'il n'y a aucune opposition entre la foi et la raison » [32] , mais qu'au contraire, elles s’entrelacent harmonieusement, parce que l'une comme l'autre procèdent de Dieu, du Logos créateur qui, en outre, s'est fait homme.

Dans la lettre apostolique Novo millénnio ineúnte , Jean-Paul II écrivait : « Pour que le témoignage chrétien soit efficace, spécialement dans ces domaines délicats et controversés, il est important de faire un effort important pour expliquer, de manière appropriée, les motifs de la position de l'Église, en soulignant surtout qu'il ne s'agit pas d'imposer aux non-croyants une perspective de foi, mais d'interpréter et de défendre les valeurs fondées sur la nature même de l'être humain La charité se fera alors nécessairement service de la culture, de la politique, de l'économie, de la famille, pour que partout soient respectés les principes fondamentaux dont dépendent le destin de l'être humain et l'avenir de la civilisation » [33] . Cette entreprise nécessite le don des langues , que l'on acquiert lorsque l'on invoque l'Esprit Saint avec foi et que l'on met en œuvre les moyens humains adéquats.

Nous savons tous que l’Église laisse à ses fils une liberté totale en tout ce qui concerne leur vie professionnelle et leur vie de citoyen, en tout égal aux autres, tant que leurs actes ne sont pas contraires à la doctrine catholique. La sensibilité aux problèmes humains, leur approche surnaturelle, qui permet de les apprécier et de les résoudre chrétiennement, doit éveiller en chacun de nous le sens de sa responsabilité apostolique personnelle dans le débat scientifique, auquel ils pourront conférer une dimension plus humaine et plus chrétienne. C’est pourquoi il convient d’aborder très sérieusement les travaux qui ont une implication doctrinale et éthique particulière, dans les disciplines scientifiques et humaines propres à chacun. La crise morale que traverse aujourd’hui la société, et le besoin constant d’évangéliser, rendent encore plus urgente le devoir qui incombe aux chercheurs chrétiens de continuer à traiter avec constance et profondeur de tels sujets, afin de contribuer à résoudre correctement les problèmes actuels.

La moralité dans l'espace public

20. La question de la moralité dans l'espace public est un autre défi prioritaire pour l’évangélisation. La vague de sensualité qui envahit les coutumes, les lois, les modes, les moyens de communication, l'art, constitue l'un des obstacles qui s'oppose avec le plus de virulence au règne du Christ. Pour freiner cette attaque, l’on ne peut se contenter de prier et faire prier, de faire des actes de réparation et d'en demander aux autres. Mus par une responsabilité tant chrétienne qu’humaine, il nous faut également inviter beaucoup de personnes à ressentir l'urgence de faire quelque chose pour remédier à cette situation. Peu importe que ceux que l'on mobilisera ainsi soient ou non catholiques, pourvus qu'ils soient hommes et femmes de bonne volonté. Il est inutile de se contenter de se plaindre ou, pire, d'adopter l'attitude indifférente de ceux qui se contentent de ne pas être directement à l'origine d'un mal. Au contraire, il est tout le temps possible d'entamer avec davantage d'énergie un apostolat qui se propagera par capillarité. Cet apostolat commence par une conversion personnelle, qui s’étend ensuite au foyer et au milieu professionnel.

Écoutons l'exhortation de l'Apôtre des Gentils : N e recevez pas la grâce de Dieu en vain. Car il dit : "Au temps favorable, je t'ai exaucé, au jour du salut je t'ai porté secours". Or, voici maintenant le temps favorable, voici le jour du salut (2 Cor 6,1-2). Nous autres chrétiens, devons agir avec l’assurance de la foi. Purifions tout ce qui, autour de nous, n'est pas conforme à la loi de Dieu. N'ayons pas de respect humain, n'ayons pas peur que l'on voie que nous sommes des personnes convaincues de la vérité de leur foi. Benoît XVI a répété à de nombreuses reprises que certaines valeurs ne sont pas négociables : « L a protection de la vie à toutes ses étapes, du premier moment de sa conception jusqu'à sa mort naturelle ; la reconnaissance et la promotion de la structure naturelle de la famille – comme union entre un homme et une femme fondée sur le mariage – et sa défense contre des tentatives de la rendre juridiquement équivalente à des formes d'union radicalement différentes qui, en réalité, lui portent préjudice et contribuent à sa déstabilisation, en obscurcissant son caractère spécifique et son rôle social irremplaçable ; la protection du droit des parents d'éduquer leurs enfants » [34].

Le pape explique que « ces principes ne sont pas des vérités de foi, même s'ils reçoivent un éclairage et une confirmation supplémentaire de la foi ; ils sont inscrits dans la nature humaine elle-même et sont donc communs à toute l'humanité. L'action de l’Église en vue de leur promotion n'est donc pas à caractère confessionnel, mais elle vise toutes les personnes, sans distinction religieuse. Inversement, une telle action est d'autant plus nécessaire que ces principes sont niés ou mal compris, parce cela constitue une offense contre la vérité de la personne humaine, une blessure grave infligée à la justice elle-même » [35].

21. C'est pour ce même motif qu'il convient de tenir un raisonnement identique sur les éléments de la doctrine chrétienne qui souffrent de nos jours d'attaques intolérantes de la part de personnes qui s'obstinent aveuglément à vouloir éliminer le sens religieux de la société civile. Malheureusement, les exemples sont nombreux, allant d’attaques grossières contre Jésus-Christ que l'on essaie de ridiculiser aux accusations calomnieuses contre l’Église, ses ministres et ses institutions.

Le rôle du chrétien qui désire être cohérent avec sa vocation consiste à montrer le Christ aux autres, à se faire le porte-parole de l’Église – d'abord par l'exemple, mais aussi en prenant la parole de façon opportune – particulièrement sur les thèmes les plus débattus dans la société. Ce que don Álvaro avait expliqué de façon si claire me revient maintenant à l’esprit : « De même qu'il faut d'abord balayer devant sa porte […], chacun doit commencer par s'examiner pour voir comment il s'occupe de ce devoir éminemment chrétien » [36] . Ces mots font écho à la prédication de l'Apôtre aux premiers fidèles : C e que Dieu veut, c'est votre sanctification : [...] que chacun de vous sache garder son corps dans la sainteté et l'honnêteté, sans l'abandonner aux emportements de la passion, comme font les païens qui ne connaissent pas Dieu ; que personne en cette matière n'use de violence ou de fraude à l'égard de son frère [...], car Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté, mais à la sainteté (1 Th 4, 3-7) .

Cette recommandation de saint Paul revêt une dimension particulière dans les circonstances actuelles. Il est en effet impossible de lutter contre la vague de l'impureté qui tente de tout envelopper de son manteau sale et visqueux si, en notre for intérieur, nous l'accueillons avec une certaine complaisance, bien qu’elle puisse nous sembler minime. De fait, ces choses-là sont des « désirs pervers qui montent de plus en plus, bouillonnant en toi, arrivant presque à submerger de leur pourriture parfumée les grands idéaux, les commandements sublimes que le Christ lui-même a mis dans ton cœur » [37].

C'est dans cette même optique que s'exprimait saint Grégoire de Naziance, cité par le bienheureux Jean-Paul II dans son exhortation apostolique sur la mission des évêques : « D'abord, se purifier, ensuite purifier ; d'abord se laisser instruire par la sagesse, ensuite instruire ; d'abord devenir lumière, puis éclairer ; d'abord s'approcher de Dieu, ensuite conduire les autres à Lui ; d'abord être saint, ensuite sanctifier » [38].

Parce que nous ne nous considérons pas meilleurs que les autres – et en ceci nous ne nous trompons pas –, il n'y a pas de raison pour que nous n'ayons pas à lutter pour essayer, une fois après l'autre, de vivre le plus parfaitement possible en adéquation avec la doctrine de Jésus-Christ. Soyons convaincus que le combat qu'il nous revient de mener est avant tout intérieur. Il faut que nous soyons vraiment décidés à ce que nos pensées, nos projets, nos paroles et nos actions, jusqu'aux plus insignifiantes, soient conformes à la volonté de Dieu : « Nous devons lutter sur un front qui est situé à l'intérieur de nous-mêmes, le front de nos passions. Est vigilant celui qui lutte intérieurement pour écarter avec décision toute occasion de péché et tout ce qui peut affaiblir la foi, faire s'évanouir l'espérance ou diminuer l'amour » [39].

22. Il s'agit là d'un point d'examen quotidien pour les mois à venir : comment luttons-nous pour parvenir à la sainteté ? Nous battons-nous sur des points concrets issus des conseils reçus dans la direction spirituelle ? Avons-nous fréquemment recours au Seigneur, en lui demandant une conscience fine et délicate –aucun rapport avec les scrupules – pour découvrir les petites fissures de notre âme par lesquelles l'ennemi tente de s'introduire pour nous rendre moins efficaces, y compris dans notre apostolat ? Nous réjouissons-nous de découvrir de nouveaux points de lutte, auxquels nous devons nous attaquer avec décision et esprit sportif, soutenus par la grâce de Dieu ?

Non enim vocávit nos Deus in immundítiam sed in sanctificatiónem (1 Th , 4, 7). Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté, mais à la sainteté. La lutte pour la pureté est toujours attractive et possible, même si quelques médias, et toutes sortes de déviances – à commencer par nos propres tendances désordonnées – prétendent le contraire. Par conséquent, on peut et on doit proposer cet idéal à tous et en toute circonstance, même à ceux qui paraissent éloignés de cet objectif. Il n'y a personne au monde qui ne cherche un appui pour traverser la tempête que connaît notre époque, et qui n'est vraiment pas nouvelle. Nous autres chrétiens avons à la fois l'immense chance et la capacité de pouvoir transmettre cette assurance que donne la foi, à laquelle beaucoup aspirent sans s'en rendre compte. Continuons à aller de l'avant, en combattant avec joie dans les batailles du Seigneur (cf. Mc , 3,2), in hoc pulchérrimo caritátis bello , dans cette merveilleuse lutte d'amour dont l'issue heureuse pour ceux qui resteront fidèles à son Amour est pleinement garantie par la victoire du Seigneur.

23. Benoît XVI a récemment souligné l'importance d'avoir recours de façon habituelle au sacrement de Pénitence et de Réconciliation. S'adressant à des prêtres et des séminaristes à l'occasion de l' Année de la foi , il affirmait que « la célébration du sacrement de la réconciliation est elle-même une annonce et donc une voie à parcourir pour l’œuvre de la nouvelle évangélisation. Dans quel sens la confession sacramentelle est-elle donc une "voie" pour la nouvelle évangélisation ? Tout d’abord parce que la nouvelle évangélisation tire sa sève vitale de la sainteté des fils de l’Église, du chemin quotidien de conversion personnelle et communautaire pour se conformer toujours plus profondément au Christ. Et il existe un lien étroit entre sainteté et sacrement de la réconciliation, dont tous les saints de l’histoire sont témoins. La conversion réelle des cœurs, qui signifie s’ouvrir à l’action transformatrice et rénovatrice de Dieu, est le "moteur" de chaque réforme et se traduit en une véritable force évangélisatrice. Dans la confession, le pécheur repenti, par l’action gratuite de la miséricorde divine, est justifié, pardonné et sanctifié, il abandonne le vieil homme pour revêtir l’homme nouveau. Seul celui qui s’est laissé profondément renouveler par la Grâce divine, peut porter en lui-même, et donc annoncer, la nouveauté de l’Évangile » [40].

L'institution de la famille

24. Dans l'Œuvre, nous devons toujours vivre avec l'optimisme et la vision surnaturelle qui caractérisent ceux qui se savent fils de Dieu. Cependant, il n'est pas possible d’ignorer qu'en ce moment, la famille est l'une des institutions la plus menacée par la vague d'hédonisme. Cette situation engendre des maux sérieux. Deux d’entre eux sautent aux yeux : l’augmentation du nombre de cas d'infidélité matrimoniale et la difficulté croissante qu’éprouvent les jeunes à se trouver en condition d'entendre et de suivre l'appel de Dieu, en particulier dans le célibat apostolique. Par conséquent, il est particulièrement urgent et nécessaire d’entreprendre, à tous les niveaux de la société, « une croisade de virilité et de pureté » [41] .

Dans cette bataille pour la pureté, il est d'une grande importance que chacun, selon son état, pratique avec délicatesse cette vertu, qui est une affirmation joyeuse. Il convient également de ne pas négliger l'influence que l'on peut exercer au moyen de l'apostolat d'amitié et de confidence. De plus, les études interdisciplinaires sur la façon d'inciter beaucoup de personnes et d'institutions du monde entier à promouvoir – en suivant l'exemple des premiers chrétiens – la nouvelle culture, la nouvelle législation et le renouvellement du secteur de la mode auxquels j'ai fait allusion plus haut, sont toujours très utiles.

Il faudra prier avec persévérance et travailler beaucoup pour atteindre un objectif qui, pour être ambitieux, est le type même du défi chrétien : généreux par les désirs élevés qui l'inspirent, il est en même temps adapté aux possibilités de chacun. Soyons convaincu que nous pouvons tous faire mieux que nous ne l’imaginons. Grâce à de petites choses – un bon exemple, une prise de parole opportune, une sainte intransigeance – nous pouvons agir dans notre milieu. Il me vient en mémoire une image que saint Josémaria utilisait à propos des questions écologiques. Je vous la transmets telle quelle, car elle me paraît très bien illustrer mes propos.

« Je disais récemment à vos frères aînés, me souvenant des nombreuses fois où nous avons discuté de barques et de filets de pêche, que de nos jours, l’on traite très souvent d’écologie dans les discussions ou par écrit. On analyse la qualité de l'eau de toutes les rivières, fleuves, lacs et mers. On aboutit pratiquement toujours à la conclusion que la qualité de l’eau est mauvaise ; que les poissons ne disposent pas d’un environnement sain et viable. Quand nous avons parlé de barques et de filets, vous et moi faisions toujours référence aux filets du Christ, à la barque de Pierre, et aux âmes. Car le Seigneur a dit : Suivez-moi, et je ferai de vous des pêcheurs d'hommes ( Mt 4, 19). Eh bien, il peut arriver que quelques-uns de ces poissons, de ces hommes, voyant ce qui se passe dans le monde et dans l’Église, face à ces mers qui paraissent couvertes d'immondices, face à ces rivières qui semblent déborder de bave, où ils ne sauraient trouver ni nourriture ni oxygène ; il peut arriver que ces poissons pensent – et c'est bien de poissons qui pensent dont nous parlons, car ils ont une âme –, il pourrait arriver qu'ils se disent : assez, je m'en vais ! Cela ne vaut pas la peine de vivre ainsi. Je vais me réfugier sur la rive et, une fois là-bas, je pourrai respirer à mon aise. Assez ! Non, mes enfants. Nous devons poursuivre notre chemin au milieu de ce monde pourri ; au milieu de ces eaux troubles ; au milieu de ces rivières et de ces fleuves qui coulent dans les grandes villes et les petits villages et dont les eaux n'ont pas le pouvoir de fortifier l'organisme ou d'étancher la soif, car elles sont empoisonnées. Mes enfants, continuons à vivre au beau milieu du monde, en essayant de purifier les eaux qui se trouvent autour de nous, pour que d'autres poissons y trouvent refuge et que, au fur et à mesure, elles deviennent un lac grandissant qui purifie les fleuves qui y trouvent sa source et qui, à leur tour, jetteront leurs eaux saines dans les mers du monde » [42].

25. La situation sociale et morale de l’Empire romain, dans lequel l’Église est née, était similaire à celle de nos sociétés actuelles. C'est cette atmosphère décadente que les premiers chrétiens ont eu le désir de changer. Nous devons faire nôtre cette volonté de répandre la bonne odeur du Christ dans le monde entier. Il s'agit là d'une tâche que les chrétiens devront toujours assumer.

Les pères et les mères de famille ont à cet égard un rôle à jouer qui leur est propre. Leur ardeur à faire grandir leurs enfants et à vivre eux-mêmes dans un foyer profondément chrétien fera de leur famille un modèle de conduite chrétienne. Ils seront comme une réserve d'eau pure qui rejaillira sur beaucoup d'autres ménages. Cela favorisera également l'apparition de vocations de don à Dieu dans le sacerdoce ou au service de l'une des multiples autres formes de réalités ecclésiales, séculière ou religieuse. Ce sont ces familles qui seront les nouveaux « foyers lumineux et joyeux » dont saint Josémaria parlait.

J'insiste : c'est aux pères et aux mères de famille qu'il revient de mener, comme partie intégrante de leurs droits spécifiques, toute une gamme d'activités d'apostolat personnel pouvant revêtir des formes diverses. Il est en effet normal que plusieurs parents, confrontés à des problématiques similaires, s'associent pour essayer de leur apporter une solution : le bon usage du temps libre, la détente et le divertissement, les voyages, la promotion de lieux où garçons et filles peuvent grandir humainement et spirituellement, etc. Il incombe à plus d’un titre aux parents ayant des enfants en âge d'aller à l'école – il s'agit là d'une partie très importante de leur responsabilité d'éducateurs – de choisir, et même de promouvoir des écoles et des clubs pour jeunes. De plus, il est évident que leur implication personnelle dans la bonne marche des établissements scolaires que fréquentent leurs enfants revêt une grande importance. Ils doivent mettre à profit tous les instruments que la loi met à leur disposition pour donner à ces institutions une orientation adéquate.

Ces derniers temps, après bien des années de propagande en faveur de la mixité scolaire, l'idée que l'éducation séparée des garçons et des filles dans l'enseignement primaire et secondaire pourrait être bénéfique aux générations à venir recommence à faire son chemin. Cela vaut la peine de continuer à soutenir cette réflexion. Il faut favoriser la recherche et la publication d'argumentaires sur ce sujet, tant sous l'angle technique (arguments juridiques, pédagogiques, etc. en faveur de cette option) que médiatique. Il s'agit de montrer la légitimité et les avantages de cette façon d'instruire les enfants, qui est la preuve d'un grand respect envers les petites filles et les petits garçons, envers les adolescentes et les adolescents. C'est une méthode éducative qui a fait ses preuves, y compris du point de vue de la formation humaine.

26. Dans la même perspective, il est nécessaire également de promouvoir une juste compréhension du concept de liberté. Ce don est souvent confondu à tort avec la simple capacité de faire ce que l'on préfère à tout instant, de choisir ce qui satisfait le plus les envies et la commodité, sans tenir compte du rapport intime qui existe entre la liberté et la vérité. La liberté est un grand bien de la nature, mais elle a été affaiblie par le péché. Toutefois, le Christ l'a guérie par sa grâce et lui a donné une dimension nouvelle et surnaturelle : elle est devenue la liberté des enfants de Dieu (cf. Rm 8, 18-19,21). Saint Josémaria, précisément parce qu'il se savait et se sentait profondément fils de Dieu le Père – une filiation qui engage la vérité la plus intime de l'homme et de la femme – a acquis une compréhension particulièrement pénétrante de la liberté chrétienne. Il mettait en garde contre « l’erreur de ceux qui se contentent d’une triste vocifération : liberté ! liberté ! Souvent, ce qui se cache derrière cette proclamation, c’est une tragique servitude : car un choix qui préfère l’erreur ne libère pas ; le Christ seul libère, puisque lui seul est le Chemin, la Vérité et la Vie » [43] . Et il ajoutait : « La liberté acquiert son sens authentique lorsqu’on l’exerce au service de la vérité qui rachète, lorsqu’on en use pour rechercher l’Amour infini d’un Dieu qui nous libère de toutes les servitudes » [44].

Les chrétiens doivent faire tout leur possible, comme des citoyens responsables, pour défendre et promouvoir leur liberté et celle des autres. En même temps, ils aideront leurs concitoyens à découvrir cette nouvelle liberté : hac libertáte nos Christus liberávit ( Gal 5, 1), cette liberté par laquelle le Christ nous a libérés. Il s'agit là de l'une des tâches les plus urgentes de la nouvelle évangélisation. J'ai déjà rappelé que les personnes qui doivent parvenir à la sainteté par le mariage jouent un rôle unique à cet égard. J'insiste, cependant : l'obligation de diffuser la bonne doctrine sur le mariage et la famille est de la responsabilité de chacune et de chacun

CONNAITRE ET PROFESSER LA FOI

27. Tous les efforts pour mener à bien la nouvelle évangélisation – que ce soit dans l’apostolat de l’intelligence, ou dans les domaines prioritaires dont je viens de parler – doivent s’appuyer sur le fondement solide de la foi. Sans la foi, en effet, il est impossible de plaire à Dieu (He , 11, 6), dit la Sainte Écriture.

Cette vertu théologale de la foi, qui est comme la porte d'entrée de la vie chrétienne, suppose une libre adhésion de l’intelligence. Elle conduit à être pleinement fidèle à la Volonté de Dieu. Elle est actualisée par les vérités que Dieu nous a révélées. Ces vérités doivent être acceptées du fait même de l'autorité du Créateur, car elles nous ont été transmises avec la certitude qu'elles venaient de Lui, dont la Genèse dit explicitement qu'il n'a voulu que le bien de la création. C’est pourquoi la foi, pratiquée et assumée sérieusement, stimule notre pleine et continuelle confiance en Dieu. Cette dernière, en nous exerçant à un abandon libre et responsable, nous donne la certitude de participer à la vie même de Dieu, laquelle nous a été communiquée en même temps que ces vérités comme chemin pour atteindre l’union avec Dieu lui-même.

« Dans cette perspective, l’ Année de la foi est une invitation à une conversion authentique et renouvelée au Seigneur, unique Sauveur du monde. Dans le mystère de sa mort et de sa résurrection, Dieu a révélé en plénitude l’Amour qui sauve et qui appelle les hommes à convertir leur vie par la rémission des péchés (cf. Ac 5, 31). Pour l’Apôtre Paul, cet Amour introduit l’homme à une vie nouvelle : "Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle" ( Rm 6, 4). Grâce à la foi, cette vie nouvelle modèle toute l’existence humaine sur la nouveauté radicale de la résurrection. » [45] Des exemples de foi

28. L’épître aux Hébreux nous présente une succession d’hommes et de femmes fidèles qui, tout au long de l’histoire du salut, depuis Abel le juste, ont cru en Dieu et ont adhéré à lui de toutes les énergies de leur intelligence et de leur volonté, dépensant généreusement leur existence à son service (cf. He 11, 4-40). Parmi eux se détache la figure d’Abraham, notre père dans la foi [46] . Apprenons de lui, également, la force de son espérance en Dieu, car notre vie à tous doit devenir davantage théologale au cours de prochains mois. Fions-nous de plus aux moyens qui nous conduisent au Ciel, en demandant avec décision à la Très Sainte Trinité d’augmenter en nous la foi, l’espérance et la charité.

Lorsqu’il se trouvait dans la ville d'Ur, en Chaldée, « Abraham entendit la parole du Seigneur qui l'arrachait à sa terre, à son peuple, en un sens à lui-même, pour faire de lui l'instrument d'un dessein de salut qui embrassait le futur peuple de l'Alliance, et même tous les peuples du monde » [47] . Immédiatement, sans aucune hésitation, le patriarche se mit en chemin

Grâce à la foi, Abraham obéit à l'appel de Dieu : il partit vers un pays qui devait lui être donné comme héritage. Et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner comme étranger dans la Terre promise ; c'est dans un campement qu'il vivait, ainsi qu'Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse que lui, car il attendait la cité qui aurait de vraies fondations, celle dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l'architecte. Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d'avoir une descendance parce qu'elle avait pensé que Dieu serait fidèle à sa promesse. C'est pourquoi, d'un seul homme, déjà marqué par la mort, ont pu naître des hommes aussi nombreux que les étoiles dans le ciel et les grains de sable au bord de la mer, que personne ne peut compter. ( He 11, 8-12).

Cette aventure de la foi continue et se développe, plus intensément et de façon plus ample, dans le Nouveau Testament. La très Sainte Vierge Marie en est un Maître inégalable, elle qui, par la foi, « a accueilli la parole de l’Ange et a cru à l’annonce qu’elle deviendrait Mère de Dieu dans l’obéissance de son dévouement (cf. Lc 1, 38). Visitant Élisabeth, elle éleva son cantique de louange vers le Très-Haut pour les merveilles qu’il accomplissait en tous ceux qui s’en remettent à lui (cf. Lc 1, 46-55). Avec joie et anxiété elle met au jour son fils unique, maintenant intacte sa virginité (cf. Lc 2, 6-7). Comptant sur Joseph son époux, elle porta Jésus en Égypte pour le sauver de la persécution d’Hérode (cf. Mt 2, 13-15). Avec la même foi, elle suivit le Seigneur dans sa prédication et demeura avec lui jusque sur le Golgotha (cf. Jn 19, 25-27). Avec foi Marie goûta les fruits de la résurrection de Jésus et, conservant chaque souvenir dans son cœur (cf. Lc 2, 19.51), elle les transmit aux Douze réunis avec elle au Cénacle pour recevoir l’Esprit Saint (cf. Ac 1, 14; 2, 1-4) [48].

C’est pourquoi méditer et pénétrer plus avant dans la foi de Marie nous conduit et nous aide à faire l’expérience de notre dépendance totale envers Dieu. Cette dépendance nous fait comprendre que, fermement placés entre ses mains, nous devenons capables d’accomplir des merveilles qui ont une incidence extraordinaire sur notre propre existence, sur l’Église et sur la corédemption du monde qui nous a été confiée. Ces conséquences extraordinaire s’étendent naturellement jusqu’aux menus travaux et petits riens qui sont apparemment les plus indifférents, car avec Dieu possumus !, nous pouvons tout, et sans lui, nihil , rien

Par la foi, les apôtres ont tout laissé pour suivre le Maître. Les disciples de la première heure ont fait de même, ainsi que les martyrs qui ont donné leur vie pour témoigner de l’Évangile, et les innombrables chrétiens de tous les temps, y compris de nos jours. « Par la foi, au cours des siècles, des hommes et des femmes de tous les âges, dont le nom est inscrit au Livre de vie (cf. Ap 7, 9; 13, 8), ont confessé la beauté de suivre le Seigneur Jésus là où ils étaient appelés à donner le témoignage de leur être chrétiens: dans la famille, dans la profession, dans la vie publique, dans l’exercice des charismes et des ministères auxquels ils furent appelés. » [49].

L’exemple de saint Josémaria

29. Fixons notre regard sur l’histoire de l’Église, qui n’a jamais manqué d’hommes et de femmes qui soient des instruments entre les mains de Dieu pour donner une impulsion et une vitalité nouvelles à la foi du peuple chrétien en des temps difficiles. Je pense à l’exemple de notre fondateur. Saint Josémaria a beaucoup médité sur la figure et la réponse de nos prédécesseurs dans la foi. C’est pourquoi, comme le patriarche Abraham, notre Père a abandonné ses projets les plus nobles, et, obéissant à la voix divine, s’est fait pèlerin sur tous les chemins du monde, pour enseigner à ses frères et sœurs une doctrine « vieille comme l’Évangile et, comme l’Évangile, nouvelle » [50] : Dieu nous convoque tous pour être saints dans le travail et les circonstances de la vie ordinaire, au milieu des réalités temporelles. Saint Josémaria fut un homme, un prêtre, rempli de foi et d’espérance, vertus qu’avec la charité, le Seigneur a infusées avec une intensité croissante dans son âme. C’est parce qu’il a cultivé cette foi immense et cette grande espérance qu’il est parvenu à mener à son terme la mission qu’il avait reçue. Aujourd’hui, les personnes de tous âges, races et conditions sociale qui vivent de cet esprit et cherchent ainsi la gloire de Dieu sont innombrables, comme les étoiles du ciel, comme le sable au bord de la mer ( Gn 22, 17).

La vie de saint Josémaria montre que chacune de nos journées peut et doit être un temps de foi, d’espérance, d’amour, sans concession à l’égoïsme. Il convient donc de nous demander comment se manifestent les vertus théologales dans notre conduite quotidienne : est-ce que nous savons reconnaître la Providence de Dieu, notre père, en toutes circonstances, aussi bien celles qui se présentent sous un aspect favorable que celles qui paraissent défavorables ? Autrement dit, est-ce que nous sommes fermement persuadés que ómnia possibília credénti ( Mc 9, 23), que tout est possible pour celui qui croit, même si nous n’avons que peu de mérites personnels et manquons de moyens humains ? Sommes-nous optimistes dans l’apostolat, d’un optimisme fondé sur la conviction que – comme l’affirme l’Apôtre – ómnia possum in eo, qui me confórtat ( Ph 4, 13), nous pouvons tout dans le Christ, qui nous rend fort ?

Peut-être devrons-nous conclure que nous ne nous entraînons pas encore avec assez d’énergie à vivre ces vertus. Nous pourrons alors nous appliquer ces considérations de saint Josémaria : « Nous manquons de foi. Le jour où nous vivrons cette vertu — tout confiants en Dieu et en sa Mère —, nous serons courageux et loyaux. Dieu, qui est le Dieu de toujours, fera alors des miracles par nos mains. — Donne-moi, ô Jésus, cette foi, que je désire véritablement ! Ma Mère, Notre-Dame, ma Mère très sainte, faites que je croie ! » [51].

Notre Père a prié très souvent, pour que lui-même, que ses nombreux enfants, et que tous les chrétiens, grandissent dans les vertus théologales : adáuge nobis fidem, spem, caritátem! , augmente en nous la foi, l’espérance et l’amour. Chaque jour il priait pour cela, le demandant aussi – silencieusement, avec le cœur – tandis qu’il élevait l’hostie ou le calice lors de la Sainte Messe. Il était animé par le seul but d’être un meilleur serviteur de Dieu et des âmes – et que nous le soyons aussi – à toute heure et en toute situation En cela se trouve, j’insiste, la condition nécessaire pour que de nouveaux fruits poussent sur le chemin de l’Église, maintenant et toujours. Comme l’écrivait le pape, « Nous désirons que cette Année suscite en chaque croyant l’aspiration à confesser la foi en plénitude et avec une conviction renouvelée, avec confiance et espérance. » [52].

« Réfléchir sur l’acte lui-même par lequel on croit – ajoute le pape – est un engagement que chaque croyant doit faire sien, surtout en cette Année . Ce n’est pas par hasard que dans les premiers siècles les chrétiens étaient tenus d’apprendre de mémoire le Credo. Ceci leur servait de prière quotidienne pour ne pas oublier l’engagement pris par le baptême. » [53].

Demander et approfondir la foi

30. Tout au long des mois à venir et, je l’espère, de façon permanente ensuite, en récitant le Credo, pendant la messe, et à d’autres moments, efforçons-nous de professer la foi de l’Église de façon plus consciente, en faisant davantage attention aux mots que nous prononçons et à leur signification. L’étude et la méditation des différents articles du Symbole de la foi nous seront également d’une aide précieuse. Parmi les moyens que Benoît XVI suggère d’utiliser pour donner une consistance et une efficacité véritables à l’année de la foi, il y en est une qui a une importance particulière : l’étude du Catéchisme de l’Église catholique , ou celle de son Compendium , précieux héritage du concile Vatican II, où sont exposées de façon complète, organique et ordonnée toutes les vérités de la doctrine catholique.

« Il existe une unité profonde entre l’acte par lequel on croit et les contenus auxquels nous donnons notre assentiment » [54] . La connaissance du contenu de la foi est essentielle pour pouvoir lui donner notre assentiment, pour adhérer pleinement, avec l’intelligence et la volonté, à ce que l’Église enseigne. Cela implique, par conséquent, que lorsque l’on croit, on accueille librement tout le mystère de la foi, car c’est Dieu lui-même qui en garantit la vérité, en révélant et en offrant son mystère d’amour à notre raison

« D’autre part – poursuit le pape – , nous ne pouvons pas oublier que, dans notre contexte culturel, de nombreuses personnes, bien que ne reconnaissant pas en soi le don de la foi, sont quand même dans une recherche sincère du sens ultime et de la vérité définitive sur leur existence et sur le monde. Cette recherche est un authentique 'préambule' à la foi, parce qu’elle met en mouvement les personnes sur le chemin qui conduit au mystère de Dieu » [55].

Nous avons un travail magnifique à fournir, sans nous décourager, pour révéler les inquiétudes spirituelles qui habitent toutes les âmes, afin de leur proposer la formation opportune qui étanchera leur soif de Vérité. En particulier, il est aujourd’hui d’une grande importance d’apprendre ou de rappeler à ceux que nous fréquentons pour une raison ou pour une autre, que la vie sur terre n’est que l’une des étapes, transitoire, de l’existence humaine. Dieu nous a créés pour la vie éternelle, il nous a destinés à participer de sa vie divine elle-même, pour que nous jouissions ainsi d’un bonheur complet et éternel. Ce don de la très sainte Trinité ne nous est accordé en plénitude qu’après notre mort corporelle, mais nous en avons un avant-goût dès ici-bas. La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul véritable Dieu, et ton envoyé, Jésus-Christ (Jn 17,3). Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour ( Jn 6, 54).

31. Une autre occasion se présentera à nous, au cours des mois à venir, de méditer le mystère de Jésus-Christ en profondeur. Par ses œuvres et ses paroles, Jésus nous a manifesté le Père et nous a montré le chemin qui conduit à lui. Il nous a donné ce dont nous avions besoin pour parvenir au but : l’Église, ses sacrements et ses fondations. Plus encore, il nous a envoyé l’Esprit Saint qui, habitant dans les âmes par la grâce, conduit en permanence les hommes vers la maison du Père. Tout est le fruit de la bienveillance divine, car e n ceci consiste son amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés (1 Jn 4, 10).

Convainquons-nous qu’il est fondamental de méditer et d’inviter les autres à méditer cette vérité essentielle : « Dieu nous aime ! Lui, le Tout-Puissant, l'Omnipotent, qui a fait le ciel et la terre » [56] . Étonnons-nous et rendons grâce pour cette impressionnante déclaration, que nous devons diffuser partout au moyen d’une catéchèse universelle. Ce mot de catéchèse signifie précisément, dans son étymologie grecque, la plus littérale, "faire résonner aux oreilles" un message. Pour les chrétiens, la catéchèse est la méthode d’enseignement utilisée par l’Église dès les premiers temps, dès qu’elle a commencé à transmettre à l’humanité la perle très précieuse et le trésor du salut, comme l’expliquait le Maître. Ainsi, c’est en écoutant que les premiers disciples du Seigneur ont accueilli la bonne nouvelle et qu’ils l’ont transmise à d’autres, de façon à influencer le vouloir et l’agir de ceux qui l’entendaient et la mettaient en pratique.

Maintenant, après vingt siècles de christianisme, nous devons nous comporter de la même façon : faire résonner la Vérité apportée par Jésus-Christ dans le cœur des personnes que nous rencontrons sur notre chemin terrestre. Apportons également, par la prière, la Vérité à ceux que nous ne fréquentons pas personnellement. Nous devons faire prendre conscience à tous, à chacune et à chacun, de la façon la plus opportune, que « Dieu a pensé à toi depuis toute éternité ! Dieu t ’aime ! Dieu a préparé pour toi un lieu indescriptible, le Ciel, où lui-même se donnera à toi pour ta joie éternelle, étanchant abondamment la soif de bonheur que tu portes dans ton cœur ».

32. Il ne faut pas considérer ces vérités fondamentales comme acquises. Bien des personnes ne connaissent pas Dieu ou s’en font une idée qui est erronée. Certains s’imaginent un Dieu jaloux toujours prompt au châtiment quand sa loi n’est pas accomplie, d’autres un Dieu auquel on n’a recours qu’en cas de nécessité. D’autres encore se représentent Dieu comme enfermé dans son propre bonheur, très éloigné des peines et des angoisses des hommes, etc. Ne cessons jamais de nous demander si, grâce à notre joie et notre paix intérieure, ceux qui nous voient peuvent toucher du doigt la Bonté du Seigneur pour ses enfants.

Nous avons tous besoin de renforcer en permanence « ce socle d’idées claires sur les thèmes fondamentaux, pour être en condition d’illuminer un grand nombre d’intelligences et de défendre l’Église des attaques qu’elle subit de toute part. Ayons des idées claires sur les vérités de la foi et de la morale ; sur les exigences de la famille et de l’enseignement chrétien ; sur les droits au travail, au repos, à la propriété privée, etc. De cette façon, vous pourrez faire avec joie l’expérience de la vérité de ces mots : véritas liberábit vos (Jn 8, 32), car la vérité vous donnera joie, paix et efficacité » [57].

Demandons avec force à l’Esprit Saint de nous assister, pour que nous sachions proposer un témoignage convaincant, et exposer, chacun selon ses connaissances et sa formation, les arguments rationnels qui aident chaque créature à ouvrir son esprit à la vérité. Prions avec persévérance et confiance. Ce point est de la plus haute importance. Souvenons-nous de la promesse du Seigneur : J e vous le dis en vérité, si deux d’entre vous, sur la terre, unissent leurs voix pour demander quoi que ce soit, cela leur sera accordé par mon Père qui est aux cieux ( Mt 18, 19). Si nous demeurons unis dans la prière, en serrant les rangs, comme une armée en ordre de bataille , une bataille de paix et de joie, nous obtiendrons du Ciel ce pour quoi nous supplions Dieu.

En commentant le verset de l’Évangile que je viens de retranscrire, Benoît XVI fait remarquer « Le verbe que l'évangéliste utilise pour dire "s'unissent" est […] une référence à une "symphonie" des cœurs. C'est cela qui touche le cœur de Dieu. L'accord dans la prière apparaît donc important pour qu'elle soit accueillie par le Père céleste » [58] . Restons toujours très unis au pape et à ses intentions car c'est ainsi que nous nous approcherons davantage du Christ et, avec lui, par l’Esprit Saint, notre prière parviendra rapidement à Dieu le Père.

FORMATION DOCTRINALE

33. Notre Père relevait cinq aspects fondamentaux de la formation : formation humaine, doctrinale, spirituelle, apostolique et professionnelle. L’ Année de la foi est pour nous une invitation exceptionnelle à réfléchir de nouveau sur notre formation doctrinale. Et ce pour une raison bien simple : toute cette formation n'a d'autre but que de nous faire approfondir, sous différents points de vue, les contenus de la foi et le sens de la foi elle-même, afin que, renouvelant notre intelléctus fidei (notre intelligence de la foi), nous puissions annoncer et proposer de façon adéquate à nos collègues et amis, le mystère de l’amour de Dieu en Jésus-Christ.

Formation à la doctrine de l’Église

34. C’est pourquoi notre fondateur condensait en une formule frappante l’activité fondamentale de l’Œuvre : « faire connaître la doctrine » . De là, cet effort constant et agréable pour assurer aux fidèles de la Prélature l’aliment de la formation, particulièrement sous son aspect doctrinal. Je pense que notre Père se réjouit en contemplant du haut du ciel tous ces cours dispensés en continu, en accord avec les projets et les besoins de chaque lieu. À tous, je vous rappelle ce qu’il nous répétait lui-même avec insistance, pour que cela reste gravé en nous : « Efforcez-vous d’assimiler la doctrine qui vous est donnée, pour qu’elle reste vivante ; prenez toute la mesure de ce devoir impérieux et agréable à la fois, qui est de communiquer à d’autres esprits la formation que vous recevez, de sorte qu’elle s’exprime en œuvres positives et droites, non seulement en vous mais dans le cœur des autres » [59] . Pour servir, servir , aimait à dire saint Josémaria, en jouant sur les divers sens de l’expression : être utile aux autres, et être réellement apte à affronter les diverses circonstances. Cette formule résumait l’importance que revêt pour nous l’acquisition d’une bonne formation, dans tous les domaines, avec le désir de prêter une collaboration effective aux plans de Dieu et à l’Église. « Pour être en mesure de servir les âmes, il nous faut d’abord être nous-mêmes aptes au service, c’est-à-dire nous former. Faute de quoi, nous ne serons pas de bons instruments et nous ne servirons à rien » [60] . Appliquons ce conseil à notre finalité apostolique : seul est utile celui qui possède et cultive une foi vivante et éclairée, car ce n’est qu’à partir d’une telle foi qu’on peut servir l’apostolat de l’Œuvre et la formation doctrinale des autres.

Convaincu de cette permanente nécessité, saint Josémaria fixa des repères précis pour la formation doctrinale des fidèles de l’Œuvre, et les développa progressivement. Considérons, dans notre dialogue avec le Seigneur, ce qu’il ne cessait de nous expliquer : « Les objectifs que nous nous proposons collectivement sont la sainteté et l’apostolat. Et pour y parvenir, nous avons besoin, par-dessus tout, de formation Pour notre sainteté, de la doctrine ; et pour l’apostolat, de la doctrine. Et pour acquérir la doctrine, du temps, des lieux adaptés et des moyens adéquats. N’attendons pas de Dieu des révélations extraordinaires : il n’a pas à nous en accorder, dès lors qu’il nous donne des moyens humains bien concrets : l’étude et le travail. Il faut se former, il faut étudier » [61] .

Le Paraclet, qui demeure avec le Père et le Fils dans les âmes en état de grâce, est véritablement, pour ceux qui écoutent sa voix et se montrent dociles à ses inspirations, celui qui fait « pénétrer l’enseignement de Jésus dans l’esprit et le cœur des hommes » [62] . Jésus lui-même l’appelle Esprit de vérité , et nous dit à son sujet : Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira vers la vérité tout entière ; car il ne parlera pas de lui-même ; mais tout ce qu’il entendra, il le dira (…) Il me glorifiera, car c’est de mon bien qu’il prendra pour vous en faire part ( Jn 16,13-14). Et le saint-père Jean-Paul II commentait ainsi ces textes évangéliques : « Si Jésus a dit de lui-même : Je suis la vérité ( Jn 14, 6), c’est bien cette vérité du Christ que l’Esprit Saint fait connaître et diffuse (…) L’Esprit est Lumière de l’âme, Lumen cordium , comme nous l’invoquons dans la séquence de la Pentecôte » [63].

En tant que chrétiens, nous pouvons nous considérer plus libres que quiconque, pour peu que nous ne nous laissions pas entraîner par les tendances éphémères du moment. L’Église encourage ses enfants à se comporter comme « des citoyens catholiques responsables et conséquents dans leur conduite, de sorte que pour chacun, cœur et cerveau ne soient pas disjoints mais à l’unisson dans une fermeté commune : envisager avec clarté ce qui doit être fait, et le faire sans se laisser entraîner, par manque de personnalité et de droiture de conscience, par des courants ou des modes passagers ; ainsi, nous ne serons plus des enfants, nous ne nous laisserons plus ballotter et emporter à tout vent de la doctrine, au gré de l’imposture des hommes et de leur astuce à fourvoyer dans l’erreur ( Eph 4, 14 ) » [64].

Approfondissement de la doctrine de la foi

35. Si nous aspirons à connaître et aimer Dieu, si nous désirons que les autres le connaissent et l’aiment, alors il est indispensable que la doctrine catholique informe toujours plus profondément notre intelligence et notre volonté. Cette responsabilité revêt une urgence particulière aujourd’hui, face à une culture dominante qui tend à s’éloigner de Dieu.

De là l’importance décisive d’une constante formation doctrinale. Ne cessez jamais d’étudier, et d’étudier, en particulier, la théologie – chacun selon ses possibilités – en vue d’acquérir cet intellectus fidei dont je vous parlais à l’instant. Au plus intime de nous-même, doit se faire sentir cette tension pressante et joyeuse de la « fides quaerens intellectum » [65] , de l’intelligence informée par la foi qui nous pousse à comprendre toujours plus profondément ce que nous croyons. Étudier la théologie, non comme une routine ou pour se remplir la mémoire, mais de façon vitale, contribue grandement à ce que les vérités de la foi deviennent connaturelles à notre intelligence ; peu à peu nous apprenons à penser dans la foi et à partir de la foi. C’est la seule façon d’arriver à un discernement équilibré des multiples questions, souvent complexes, qui surgissent dans notre activité professionnelle et au sein de la société en général. Mes filles et mes fils, vous êtes libres et chacun de vous décide et agit avec la plus grande autonomie : c’est précisément pour cela que vous devez vous efforcer de bien former votre intelligence et votre conscience. Vous disposerez ainsi d'un véritable capital de connaissances, dans les savoirs humains comme dans la science théologique, et vous serez capables de penser, de juger et d’agir comme il sied à un chrétien

Il nous faut nous enrichir intellectuellement pour rester fidèles, sans risque d’erreur, à ces aspects de la doctrine catholique qui concernent de plus près notre profession, ou qui sont d’une particulière actualité dans notre pays. Ces aspects ne sont pas forcément les mêmes partout, mais il y en a tout de même certains qui, à l’heure actuelle, sont partout au premier plan : ceux qui touchent au mariage et à la famille, à l’éducation, la bioéthique, etc.

36. Dans cette ligne, j’ai déjà attiré votre attention sur l’intérêt de poursuivre l’effort de perfectionnement et de spécialisation des professeurs des divers Studia generalia de la Prélature ; de développer des programmes de recherche de haut niveau dans les universités auxquelles l’Opus Dei prête son assistance spirituelle ; et de promouvoir des groupes interdisciplinaires, réunissant par exemple médecins, biologistes, juristes, philosophes et sociologues, qui se consacrent à ces questions dans une perspective apostolique.

Les fidèles de la Prélature ne manquent pas, qui pourront réaliser un travail analogue, associés à d’autres personnes, dans les centres académiques publics ou privés où ils exercent. Et plus nombreux encore ceux qui, sans être impliqués professionnellement dans ces domaines particuliers, sont en condition d’apporter leur petite pierre pour contribuer à créer une opinion publique saine, respectueuse de la loi naturelle et imprégnée par le message chrétien, en tirant opportunément parti des moyens de communication sociale. Vous m’avez entendu dire souvent qu’une simple lettre ou un e-mail adressé à un journal pour expliquer de façon sympathique et claire – avec le don des langues – un point de la doctrine catholique, est parfois plus efficace qu’un traité volumineux. Lorsque l’opinion publique d’un pays présente une vision déformée de l’Église, allant jusqu'à des campagnes ouvertes de dénigrement, les catholiques ne peuvent pas rester passifs : nous devons réagir, par devoir de justice envers Dieu et la société, contre ces abus, mettre en lumière le caractère tendancieux de ces attaques, et exiger le respect que mérite l’Église, quelles que soient les fautes de certains de ses membres.

Pour cela, j’y insiste, prenons conscience de la nécessité impérieuse d’améliorer constamment notre formation théologique, d’approfondir – à la mesure des besoins et des circonstances de chacun – les questions agitées dans le débat public qui ont un rapport avec des aspects fondamentaux de la Révélation Tirons tout le parti possible des cours et conférences de philosophie, de théologie, de droit canon, en assistant à ces moyens de formation avec envie, ponctuellement et désireux d’en profiter au mieux. Ces activités sont en outre l’occasion d’offrir à d’autres personnes la catéchèse doctrinale et spirituelle à laquelle elles aspirent.

37. Dans ses enseignements sur les Pères de l’Église, Benoît XVI s’attarde longuement sur un point qui revêt une importance toute spéciale de nos jours. Il affirme que la grande erreur des anciennes religions païennes fut de ne pas s’attacher aux chemins tracés au fond des âmes par la Sagesse de Dieu. « Aussi le déclin de la religion païenne était-il inévitable : c’était la conséquence logique de l’éloignement de la religion de la vérité de l’être, causé par sa réduction à un ensemble artificiel de cérémonies, de conventions et de coutumes » [66] . Le pape ajoute : en revanche, les anciens Pères et les auteurs chrétiens optèrent pour la vérité de l’être contre le mythe de la coutume » [67] . Tertullien, rappelle le pape, avait écrit : « Dominus noster Christus veritatem se, non consuetudinem, cognominavit : Le Christ affirma qu'il était la Vérité, non la coutume [68] . À cet égard , poursuit le Successeur de Pierre, il convient d’observer que le mot de coutume qu’utilise Tertullien pour se référer à la religion païenne, peut être traduit dans les langues modernes par des expressions telles que mode culturelle ou mode du moment » [69] .

N’en doutons pas : malgré la victoire apparente du relativisme en certains endroits, cette façon de penser et de désorienter bien des gens finira par s’effondrer comme un château de cartes, faute d’être ancrée dans la vérité de Dieu Créateur et Provident qui gouverne les voies de l’histoire. En même temps, la réalité que nous observons autour de nous doit nous encourager à ne pas nous laisser aller, ni à abandonner les personnes qui évoluent dans une situation de désenchantement et de sentiment de vide.

S’UNIR AU CHRIST PAR LA PRIÈRE ET LE SACRIFICE

38. J'ai pu constater que saint Josémaria a souvent médité et répété les paroles de saint Ignace d’Antioche qui, se rendant à Rome pour y souffrir le martyre, considérait qu’il était « froment de Dieu » et qu’il devait être moulu sous la dent des fauves « pour devenir le pain immaculé du Christ » [70] . Nous autres chrétiens, nous savons que nous sommes également froment de Dieu , parce que nous ressentons l'aimable obligation d’offrir un aliment spirituel à ceux que nous croisons, pour une raison ou une autre.

Soyons profondément convaincus que Dieu veut que nous soyons pain du Christ, susceptible d'assouvir la faim des âmes. Et pour y parvenir, il faut se laisser moudre sans opposer de résistance, comme les grains des épis ; et se décider, sans concession, à laisser le Seigneur agir en profondeur pour nous nettoyer, pour limer les aspérités de notre caractère, pour éliminer de notre conduite extérieure et intérieure — par amour, même s’il nous en coûte — ce moi que chacun préserve au plus haut degré. Ce travail de purification est nécessaire — chacun le sait par expérience — si l’on veut obtenir les fruits surnaturels qui conviennent. Notre divin Maître nous l’a expliqué de manière imagée : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit ( Jn 12,24).

S’unir au Christ sur la Croix

39. Jésus-Christ veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité (1 Tim 2, 4). Cette sainte ambition doit imprégner notre comportement : il nous faut donner une forte coloration apostolique à ce que nous faisons, dans les situations et les moments les plus variés. Chaque fidèle de l’Œuvre, même s’il n’est pas en condition de réaliser un apostolat immédiat, parce qu’il est malade, parce qu’il se trouve dans un endroit nouveau ou parce qu’il ne connaît pas la langue, réalisera ainsi un apostolat très direct et très fécond. Nous y arriverons tous si nous peaufinons nos relations avec Dieu grâce à nos normes de piété, et si nous nous efforçons de bien terminer le travail commencé, en le présentant chaque jour à Dieu dans la sainte Messe. Le Seigneur attend que nous lui offrions cette volonté de saisir et de rechercher les petites mortifications ou contraintes avec un rythme ininterrompu, « comme le battement du cœur » [71].

L’union avec le Christ sur la Croix est fondamentale si nous voulons mener à bien ce programme apostolique. Il est impossible de suivre le Christ sans se renier soi-même, sans cultiver cet esprit de mortification, sans œuvres pratiques de pénitence. Le saint-père explique que « c’est la gloire du Crucifié que chaque chrétien est appelé à comprendre, à vivre et à témoigner à travers son existence. La Croix — le don de soi-même du Fils de Dieu — est en définitive le "signe" par excellence qui nous est donné pour comprendre la vérité de l’homme et la vérité de Dieu : nous avons tous été créés et rachetés par un Dieu qui a immolé son Fils unique par amour. Voilà pourquoi dans la Croix, comme je l’ai écrit dans l’Encyclique Deus caritas est , "s’accomplit le retournement de Dieu contre lui-même, dans lequel il se donne pour relever l’homme et le sauver — tel est l’amour dans sa forme la plus radicale" (n° 12) » [72].

S'introduire dans les plaies du Christ

40. Nous avons souvent entendu cette comparaison que faisait saint Josémaria, lorsqu’il affirmait que les chrétiens qui souhaitent cheminer près du Maître doivent être « dans les mains blessées du Christ, comme la semence que le semeur divin lance dans les sillons : le semeur introduit sa main dans le sac, en retire une pleine poignée de grains dorés et les lance à la volée ; c’est à cela que doit ressembler votre don et le mien ; sans rien attendre sur cette terre et sans nous inventer des épreuves qui n’existent pas. Mais pour être fécond, le grain doit s’enterrer et mourir en apparence, comme l’affirme l’Évangile (cf. Jn 12, 24). Ainsi seulement nous serons la bonne graine pour les semailles que le Seigneur veut préparer pour ouvrir des chemins divins sur la terre » [73].

Ces considérations peuvent nous aider à nous demander si nous nous efforçons sérieusement d’être des âmes pieuses et pénitentes, en étant fermement persuadés que « l’action ne vaut rien sans la prière ; la prière est valorisée par le sacrifice » [74] . Demandons au Seigneur de nous accorder d’être, tous les jours, dévorés de désirs d’une plus grande générosité, et de nous donner vraiment envie de nous dépenser généreusement pour le bien des âmes. Et nous ne pourrons y arriver que si nous nous efforçons d’actualiser chaque jour, dans la sainte Messe, le ferme propos d’être une hostie vivante unie au Christ.

Personne ne saurait contester la grandeur et l’importance de ce qui nous est proposé : être hostie avec le Christ. À nous d’entretenir ces saintes aspirations dans nos moments de conversation personnelle plus soutenue avec lui. Invoquons Jésus, en passant par sa très Sainte Mère — Maîtresse de foi — afin qu’il nous accorde la grâce de raviver chaque jour notre zèle apostolique, et traduisons ces résolutions en actions concrètes, en accord également avec les conseils reçus dans la direction spirituelle.

Et alors, oui : Jésus nous prendra dans sa main blessée, et après nous avoir imprégnés de son précieux Sang — comme l’enseignait avec insistance saint Josémaria — il nous lancera à la volée loin, très loin, sans que nous ayons à abandonner pour autant l’endroit où il nous a placés, et le don de soi de chacune et de chacun fécondera des endroits proches et des endroits lointains ; Jésus se servira de notre travail et de notre repos, de nos joies et de nos peines, de nos paroles et de nos silences, pour jeter ses graines divines dans des myriades de cœurs. Nous serons vraiment « pain pour l’autel et pain pour la table : divins et humains » [75] . Et Jésus fera de nouveaux miracles éclatants, comme il en avait fait dans les âmes et dans les corps de ceux qui le cherchaient, lorsque les foules essayaient de le toucher parce qu’ une force sortait de lui et les guérissait tous ( Lc 6, 19).

Recourir à l’Esprit Saint

41. Jésus-Christ prêcha la bonne nouvelle avec la puissance de l’Esprit Saint (cf. Lc 4, 14) et nous autres chrétiens, nous devons avoir recours au Paraclet avec une grande confiance, comme le bienheureux Jean-Paul II nous le recommandait à l’approche du Jubilé de l’an 2000. « Dans les tâches prioritaires (…) — écrivait-il dans une Lettre apostolique — figure donc la redécouverte de la présence et de l’action de l’Esprit. Il agit dans l’Église par les sacrements, surtout par la Confirmation, ou bien dans les différents charismes, rôles et ministères spécifiques qu’Il suscite pour son bien » [76].

Il est donc tout à fait normal que, dans l’apostolat personnel et dans toute tâche apostolique nous comptions avant tout sur la réalité consolante de l’action incessante de l’Esprit Saint en faveur de la sanctification des âmes, même si cette action est généralement silencieuse. Il est « aussi pour notre époque l’agent principal de la nouvelle évangélisation (…) , Celui qui construit le Royaume de Dieu au cours de l’histoire et prépare sa pleine manifestation en Jésus-Christ, en animant les hommes de l’intérieur et en faisant croître dans la vie des hommes les germes du salut définitif qui adviendra à la fin des temps » [77] . N’en doutons pas : si nous avons recours avec foi au Consolateur, il mettra dans notre bouche la parole qu’il faut, la suggestion opportune, ainsi que l’art de corriger aimablement et humblement les comportements erronés, afin d’aider les personnes concernées à réagir.

Soignons donc particulièrement nos relations avec l’Esprit Saint car, comme l’enseignait également saint Josémaria à propos de l’action du Seigneur chez ses fils fidèles, « Dieu ne fait pas que passer, il demeure en nous. On pourrait dire qu’il est au centre de notre âme en état de grâce, et qu’il donne un sens surnaturel à nos actes, tant que nous ne nous opposons pas à lui et que nous ne le rejetons pas par le péché. Dieu est caché en vous et en moi, en chacun de nous » [78].

L’arme de la prière

42. Relisons ce qu’a déclaré Jean-Paul II le jour de la canonisation du fondateur de l’Opus Dei : « Pour accomplir une mission si exigeante, une croissance intérieure permanente alimentée par la prière est cependant indispensable. Saint Josémaria fut un maître dans la pratique de la prière, qu’il considérait comme une "arme" extraordinaire pour racheter le monde. Il recommandait toujours: "D’abord, la prière; ensuite, l’expiation ; en troisième lieu, et seulement en ‘troisième lieu’, l’action" ( Chemin,n° 82). Ce n’est pas un paradoxe, mais une vérité éternelle : la fécondité de l’apostolat se trouve avant tout dans la prière et dans une vie sacramentelle intense et constante. Ceci est, au fond, le secret de la sainteté et du vrai succès des saints » [79].

Il s’agit d’une attitude spirituelle que ce saint prêtre — notre Père — mit en pratique à partir du jour où le Seigneur passa par son âme, et cela se voit de manière évidente dans les premières années de l’Opus Dei, alors que tout restait à faire. En 1930, alors que l’Opus Dei était comme un nouveau-né, saint Josémaria s’adressait à Isidoro Zorzano, le seul fidèle de l’Œuvre à l’époque, avec des mots qui sont toujours d’actualité. « Si nous devons être ce que le Seigneur et nous-mêmes voulons, il nous faut rechercher de bons fondements, et ce sont avant tout la prière et l’ expiation (sacrifice). Prier : n’omets jamais, je te le répète, la méditation en te levant le matin ; et offre chaque jour, comme expiation, toutes les gênes et tous les sacrifices de la journée » [80].

Adoptons cette ligne de conduite, indispensable pour faire grandir notre vie de foi et pour accomplir la mission surnaturelle que le Maître confie aux chrétiens. C’est pourquoi il nous faut avant tout intensifier chaque jour nos relations avec Jésus-Christ. Que ce soit dans le travail professionnel le plus exigeant, dans la quiétude d’un oratoire ou d’une église, ou en circulant en ville, dans les moments de loisir ou de repos, dans les occupations familiales bien entendu, dans la maladie et dans les contrariétés, bref, à tout moment, nous devons parler à Dieu, avec notre âme, avec notre cœur, avec nos sens, avec nos lèvres, en nous efforçant de transformer tout ce que nous faisons en demande agréable à Dieu, souvent même sans besoin de la formuler. Mais, j’insiste, la prière est le fruit d’une vie de foi. Il faut une grande foi pour demander vraiment, pleinement convaincu, ce que demandait saint Josémaria : « Jésus, dis-moi quelque chose ; dis-moi quelque chose, Jésus. »

N’oublions pas que celui qui prie vraiment grandit en humilité ; il possède la joie de la filiation divine, il ressent l’urgence de l’apostolat quotidien ; il agit toujours avec amabilité et cordialité ; il sait servir ; il cherche à disparaître et il est docile dans la direction spirituelle.

Le sel de la mortification

43. Nous avons besoin, tant elle est unie à l'intimité avec le Seigneur, de la mortification, qui s’élève vers Dieu comme une « prière des sens » . Il y a des gens qui ont peur du mot « expiation », car ils pensent à je ne sais quelles souffrances insupportables. Rien de plus opposé à la réalité. Ce que Dieu nous demande d'ordinaire, c’est un esprit de pénitence qui se manifeste dans l’accomplissement minutieux de notre devoir d’état en fonction des circonstances de chacun, réalisé avec joie et persévérance — même s’il nous en coûte —, sans solution de continuité, et en étant héroïquement fidèle dans les petites choses.

Saint Josémaria, qui était si généreux dans les grandes pénitences auxquelles le Seigneur l’invitait — car elles faisaient partie de sa mission de fondateur — accordait une extraordinaire importance aux petites expiations, débordantes d’amour. C’est ce qu’il explique en 1930 dans des notes sur la manière de faire l’examen de conscience. « Expiation : comment ai-je reçu, en ce jour, les contradictions qui venaient de la main de Dieu ? ou du caractère de mes amis ? ou de ma propre misère ? Est-ce que j’ai su offrir au Seigneur, comme expiation, la douleur que je ressens aussi de l’avoir offensé si souvent ? Lui ai-je offert la honte que je ressens face à mes confusions et humiliations intérieures lorsque je considère la petitesse de mes progrès sur le chemin des vertus ? » [81].

Le monde a aujourd’hui particulièrement besoin — et aura toujours besoin — d’âmes qui aiment le sacrifice librement consenti par amour de Dieu. Il peut être considéré à tout moment comme une arme capable de vaincre la bataille contre l’hédonisme, qui fait tant de victimes parmi les chrétiens et les non-chrétiens, et contre les concessions excessives faites au corps et aux sens. Si nous voulons éliminer l’attachement désordonné à notre propre moi, recourons à ce remède qui consiste à offrir avec soumission, comme un véritable holocauste, profondément uni avec Jésus-Christ, nos sens internes et externes, nos facultés, notre âme et notre corps.

Nous devons « offrir notre vie, notre don à Dieu entier et sans faux-fuyants, en expiation pour nos péchés et pour les péchés de tous les hommes, nos frères ; pour les péchés commis à toutes les époques passées et pour ceux qui seront commis jusqu’à la fin des temps : avant tout par les catholiques, par les élus de Dieu qui ne savent pas correspondre, qui trahissent l’amour de prédilection dont le Seigneur fait preuve à leur égard » [82] ; en ajoutant une perspective que notre Père a toujours entretenue : cette bataille sera gagnée avec un optimisme rempli d’espoir, et en étant sûrs que le Seigneur fera de nous des vainqueurs grâce à la foi, à la confiance en lui, et à la charité envers Dieu et envers les âmes.

44. Ces paroles de saint Josémaria nous aident à affronter avec générosité les mortifications habituelles. Nous avons tous besoin de nous purifier avec détermination : ainsi seulement nous pourrons assainir, avec la joie propre des enfants de Dieu, l’ambiance dans laquelle nous vivons. « Expier et, en plus de l’expiation, l’Amour. — Un amour qui soit un cautère brûlant les impuretés de notre âme, et un feu embrasant de flammes divines la misère de notre cœur » [83] . Je vous conseille également, si parfois vous vous sentez lâches, de contempler Jésus pendant sa Passion, offerte pour nous : « Après cela… pourras-tu jamais craindre l’expiation ? » [84]

En fonction de ces caractéristiques de la conduite chrétienne, nous pourrons faire ressentir aux autres l’urgence d’une action apostolique concrète et constante auprès des jeunes et des moins jeunes, des bien-portants et des malades, ou de ceux dont nous sommes habituellement proches pour des raisons professionnelles, ou des relations d’amitié, de parenté, de goûts partagés, etc., qui constituent nos points d'insertion dans le milieu dans lequel nous évoluons de manière habituelle. Demandons à la très sainte Vierge de faire grandir notre zèle apostolique au cours des prochains mois, afin d’être des diffuseurs de la joie de la foi en Dieu et de le demeurer ; demandons-lui en outre de nous envoyer des grâces abondantes de son Fils, afin que de nombreux hommes et femmes ouvrent leurs cœurs à la grâce de Dieu, sans restrictions, et se décident à parcourir avec le Christ le chemin qui conduit à la pleine félicité que lui-même a préparée, de toute éternité, pour chacun de nous.

LA TÂCHE APOSTOLIQUE

45. La "mission", la tâche apostolique que le Seigneur nous a confiée, n’est réalisable que dans la perspective de cette "vie de foi" que nous avons décrite : elle doit en être comme "l’épiphanie". C’est la foi — doctrine et vie — qui donne solidité et efficacité à l’existence chrétienne et la rend suprêmement attirante, comme le prouve le fait que beaucoup de gens qui n’ont pas la foi désirent — sans peut-être mettre en pratique ces désirs — atteindre le bonheur et l’assurance, la paix, qu’ils voient chez ceux qui croient en Dieu.

Pratiquons donc, comme je viens de vous le dire, l’apostolat comme manifestation de foi. Notre confiance quotidienne dans le Seigneur ne doit pas diminuer. Il faut beaucoup réparer pour les offenses infligées à Dieu et le tort causé aux âmes. Mes filles et mes fils, nous prendrons précisément conscience de l’urgence de cette réparation continuelle par l’apostolat personnel que nous réalisons : cette réparation est comme le papier de tournesol qui révèle, sans le moindre doute, la profondeur des sentiments de notre âme chrétienne, l’authenticité de notre douleur face à la situation de la société. Procédons de la sorte, tout en nous sachant, comme nous le disait notre Père, capables de commettre les erreurs et les horreurs de la créature la plus pécheresse, si nous lâchons la main de Dieu. Repoussons absolument la tentation de rester inactifs. Que chacun et chacune d'entre nous, personnellement, en union d’intentions apostoliques, confie au Seigneur les personnes qui partagent d’une façon ou d’une autre nos idéaux ; pratiquons sans peur ces semailles de paix, recourant à tous les moyens licites, pour que parvienne jusqu’au dernier recoin l’écho des cloches du gaudium cum pace. Chacun à sa place

46. En fortifiant, par une foi forte et persévérante, les fondements de notre dialogue avec la Trinité, nous rendrons efficaces nos initiatives apostoliques concrètes. Saisissons toutes les occasions de servir les âmes qui se présentent à nous, et ayons vraiment le souci d’en créer d'autres. Cherchons à achever nos travaux, quels qu’ils soient, avec une parfaite droiture d’intention, en veillant bien à ce qu’aucune vaine gloire ne s’interpose dans cet effort. La droiture d’intention ne doit pas s’évanouir ou faire défaut dans nos tâches quotidiennes. C'est ainsi que toute activité, bien achevée et offerte au Ciel, contribuera à nous identifier à Jésus-Christ et à renforcer puissamment chez nous l’unité de vie.

Au cœur de la nouvelle évangélisation de la société, chaque personne se voit assigner une place précise par la Providence. Mais nous ne devons pas nous comporter passivement ni nous contenter de l’effort que nous avons fourni pour demeurer fidèles : sortons à la rencontre des âmes, pour les servir là où elles sont — aux mille jointures de l’organisation sociale, à l’université et dans les établissements scolaires, dans le milieu de travail et dans les loisirs, dans les familles — pour leur offrir la formation chrétienne dont elles ont besoin. Ressentons la sainte hantise de contribuer à la mission de l’Église dans le monde, à l'instar des premiers chrétiens. Il se peut que des obstacles surgissent à nos yeux en pleine lumière ; ce sera le moment d’appliquer à notre situation les paragraphes d’une lettre que saint Josémaria nous a adressée, à tous sans exception :

« Il est naturel, mes enfants, qu’en certaines circonstances, (...) vous preniez la mesure de votre petitesse et que vous vous disiez : tout ce travail, reposant sur moi ? Sur moi qui suis si peu de chose ? Sur moi qui suis si rempli de misères et d’erreurs ? Eh bien, à ce moment-là, ouvrez l’Évangile de saint Jean et méditez calmement ce passage où est racontée la guérison de l’aveugle né. Voyez Jésus en train de faire de la boue, avec la poussière du sol et de la salive, et de l’appliquer sur les yeux de l’aveugle pour les ouvrir à la lumière (cf Jn 9, 6). Le Seigneur utilise comme collyre un peu de boue (…). Bien conscients de notre faiblesse, de ce que nous ne valons rien, nous apportons pourtant, avec la grâce du Seigneur et notre bonne volonté, un remède qui permettra à d'autres d'obtenir la lumière ; tout conscients que nous sommes de notre petitesse humaine, nous serons force divine pour les autres » [85].

Certains et certaines d’entre vous, vous serez en mesure de collaborer de façon plus immédiate à l’instauration — à laquelle j’ai déjà fait allusion plusieurs fois — de cette nouvelle culture, de cette nouvelle législation, de cette nouvelle mode, inspirées par l’esprit évangélique, qu’il faut promouvoir sans trêve. Mais, j’insiste, une place concrète nous est assignée à tous dans cette « guerre d’amour et de paix ». Chacun, chacune d'entre nous, nous sommes en mesure, en avant-garde ou en arrière-garde, de faire un apostolat très direct qui, en communion avec toute l’Église, contribuera efficacement à l'obtention de ces objectifs.

Comme le ferment dans la pâte

47. Lorsqu'il vous arrivera de ressentir de façon plus aiguë le poids de l’ambiance adverse — sur votre lieu de travail, parmi vos parents, dans votre cercle d’amis et de connaissances —, pensez à votre responsabilité inéluctable : le Seigneur appelle les chrétiens à être le ferment au milieu de la pâte. Le Royaume des cieux est semblable à du levain qu’une femme prend et enfouit dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que le tout ait levé ( Mt 13, 33). Et saint Jean Chrysostome de commenter : « comme le levain transmet sa force à une grande quantité de farine, vous devez aussi transformer le monde entier » [86].

C’est ainsi que Dieu a agi et agit dans l’histoire du monde. Il serait en son pouvoir que tous tombent vaincus à ses pieds, car il est vrai qu'aucune créature ne peut lui résister ; mais alors il ne respecterait pas la liberté qu’il nous a accordée. Dieu ne veut pas vaincre par la force, mais convaincre par l’amour, en comptant sur la collaboration libre et enthousiaste d’autres créatures, sans oublier qu’aussi bien les multitudes que les personnes, et celles qui sont déboussolées comme des brebis sans pasteur, intéressent le Maître. S'il ne veut pas imposer sa Vérité comme un despote, il ne reste pas non plus indifférent à la vue de ceux qui sont plongés dans l’ignorance ou aux prises avec des déviations morales ; et c’est pourquoi jaillit de la bouche du bon père de famille qui invite au banquet : « Va-t’en par les chemins et le long des clôtures, et fais entrer les gens de force, afin que ma maison se remplisse » ( Lc 14, 23) : compelle intrare !

« Tout en restant en un même lieu, le Christ aurait pu attirer les gens à lui, pour qu’ils entendent sa prédication. Mais il n’a pas agi ainsi. Il nous a donné l’exemple pour que nous allions nous aussi au long des chemins, à la recherche de ceux qui se perdent, comme le berger cherche la brebis perdue, comme le médecin se rend auprès du malade » [87].

Grâce à ce travail constant, au fur et à mesure que l’Église se frayait un passage dans le monde, d’innombrables conversions se sont produites. Elles sont rarement nées de l’action d’une personnalité exceptionnelle, ou d’une stratégie pensée dans ses moindres détails. Elles ont été le résultat du bon exemple d’hommes et de femmes, de familles entières, qui avec l’aide de la grâce ont pratiqué leur foi avec naturel et ont su donner raison, à longueur de temps, de l’espérance qui est en eux (cf 1 P 3, 15).

Qu'elle est grande la responsabilité des chrétiens, celle de chacun d’entre eux ! Combien d'importantes réalisations suprêmement efficaces et attirantes dépendent de notre comportement, de notre soif d’âmes. « Si les autres s’affadissent, vous pouvez leur rendre la saveur ; mais si cela vous arrivait à vous, par votre perte vous entraîneriez aussi les autres. C’est pourquoi vous avez d’autant plus besoin de ferveur et de zèle que vous occupez de plus hautes charges » [88].

Au large !

48. Depuis les débuts de l’Opus Dei, l’apostolat des fidèles de la Prélature, des coopérateurs et de leurs amis est né au sein de l’Église comme un instrument dans les mains du Seigneur, pour rendre de grands services dans le monde entier, malgré notre petitesse personnelle à tous. Gratias tibi, Deus ! devons-nous nous exclamer constamment. Et en même temps, nous devons faire davantage. Duc in altum ! ( Lc 5, 4), au large, allons plus loin, sans peurs ni hésitations, nous appuyant toujours sur le solide fondement du commandement du Maître, pleins de la certitude de la foi en Lui. Quels panoramas apostoliques nous ouvre l’ Année de la foi ! C’est à chacun de les mettre à profit, et de mener à bien ce travail auprès des âmes, quelle que soit la situation où il se trouve : en mettant l’accent avant tout sur la prière pour des personnes et des intentions bien précises.

Prêtons attention aux domaines prioritaires de la nouvelle évangélisation que j’ai signalés plus haut ; et, dans la perspective de l’ Année de la foi , examinons notre manière personnelle d’agir pour transmettre davantage de saveur chrétienne à notre famille, à notre milieu professionnel, au cercle culturel, social que nous fréquentons, ou aux activités de loisir qui sont les nôtres. Faisons cet examen courageusement, et tirons-en des conséquences pour notre situation, sans céder à de vaines inquiétudes, mais, le cas échéant, avec une vraie douleur d’amour. Il se peut que le bilan nous fasse apparaître que nous n’en avons pas fait assez ; que nous aurions pu prier avec plus d’intensité, de confiance et de persévérance ; ou que peut-être nous avons manqué de générosité pour offrir à Dieu des sacrifices, ou que nous devons faire preuve de plus d’exigence dans le dialogue apostolique au service des autres ; ou que nous tendons à négliger la formation doctrinale. D’autres fois nous rendrons grâce au Seigneur parce qu’il a voulu se servir de nous pour sa moisson d’âmes.

Admettre nos défaillances, loin de nous conduire au découragement, doit nous stimuler de nouveau pour demander au Ciel une foi plus vive et pour repartir. Nunc cœpi ! répétait saint Josémaria avec les paroles du psaume : Maintenant je commence ; ce changement est un effet de la droite du Très-Haut ! (cf. Ps 76, 11, Vg). C’est ainsi qu’il nous faut réagir quand nous constatons que les résultats ne sont pas à la hauteur de nos désirs, et que la réalité de notre petitesse personnelle ou l’apparente inefficacité de nos efforts devient trop évidente. La solution consiste alors, plus que jamais, à commencer de nouveau : euntes docete ( Mt 28, 19), nous fiant à la parole du Seigneur, comme lorsque Jésus-Christ a envoyé en mission ses disciples.

49. Telle est l’invitation que le bienheureux Jean- Paul II a adressée aux catholiques à la fin de l’an 2000 : « Au début du nouveau millénaire, alors que (…) s’ouvre pour l’Église une nouvelle étape de son chemin, dans notre cœur résonnent à nouveau les paroles par lesquelles Jésus, après avoir de la barque de Simon parlé aux foules, invita l’Apôtre à "avancer au large" pour pêcher : " Duc in altum " ( Lc 5,4). Pierre et ses premiers compagnons firent confiance à la parole du Christ et jetèrent leurs filets. "Et l’ayant fait, ils capturèrent une grande multitude de poissons ( Lc 5,6)" » [89].

Notre Père a souvent considéré cette scène dans sa prière et sa prédication tout au long de sa vie et c’est elle que nous contemplons en direct dans l’Évangile de la messe de saint Josémaria. Je vous invite à méditer une fois de plus avec attention chaque verset, car aujourd’hui, comme au temps de Jésus, la foule est avide d’entendre la Parole de Dieu.

Le Seigneur est monté dans la barque de Pierre pour que sa parole parvienne aux oreilles de la foule ; ensuite il demande la collaboration de Simon et des autres disciples, cette fois pour ramer vers le large, et en tant d’occasions pour que son message aille de plus en plus loin. Voilà, pour une part, une première manière de participer à la mission évangélisatrice : fournir à l’Église — comme Pierre avec sa pauvre barque — les moyens matériels convenables pour travailler avec une plus grande efficacité pour le bien des âmes. Mais cet effort ne suffit pas. Le Seigneur réclame d’autre part que nous contribuions personnellement à l’apostolat, chacun en fonction de sa situation, en tirant généreusement parti des possibilités qui s'offrent à lui. On ressent l'urgence de femmes et d’hommes sérieusement engagés dans ce travail fascinant qui consiste, comme l’ont fait les premiers disciples, à déposer les âmes aux pieds du Christ.

La pêche miraculeuse nous apparaît comme le signe de l’efficacité apostolique fondée sur l’obéissance à la parole du Maître. Après avoir enseigné la foule, Jésus s’adresse à Pierre et aux autres disciples et leur dit : A llez au large et jetez vos filets pour la pêche ( Lc 5, 4). Simon s’exécute, malgré une expérience négative toute récente, et c'est alors — en vertu de cette docilité — que le miracle s’accomplit : ils prirent une grande quantité de poissons ( Lc 5, 6).

« Duc in altum ! Cette parole résonne aujourd’hui pour nous et elle nous invite à faire mémoire avec gratitude du passé, à vivre avec passion le présent, à nous ouvrir avec confiance à l’avenir : "Jésus-Christ est le même, hier et aujourd’hui, il le sera à jamais" ( He 13,8) » [90].

Je vous rappelle aussi, car c’est très d'actualité, ce que prêchait Benoît XVI le jour où il a inauguré solennellement son service pastoral sur le siège de Pierre :

« Aujourd’hui encore, l’Église et les successeurs des Apôtres sont invités à prendre le large sur l’océan de l’histoire et à jeter les filets, pour conquérir les hommes au Christ — à Dieu, au Christ, à la vraie vie. (…) Nous, les hommes, nous vivons aliénés, dans les eaux salées de la souffrance et de la mort ; dans un océan d’obscurité, sans lumière. Le filet de l’Évangile nous tire hors des eaux de la mort et nous introduit dans la splendeur de la lumière de Dieu, dans la vraie vie. Il en va ainsi — dans la mission de pêcheur d’hommes, à la suite du Christ, il faut tirer les hommes hors de l’océan salé de toutes les aliénations vers la terre de la vie, vers la lumière de Dieu. Il en va ainsi : nous existons pour montrer Dieu aux hommes. Ce n’est que là où on voit Dieu que commence véritablement la vie » [91].

Mettre en œuvre tous les moyens

50. La condition première et indispensable pour récolter des fruits apostoliques est, j’insiste, de cultiver la vie de foi, qui se traduit par le recours aux moyens surnaturels. Si nous cherchons l’amitié de Jésus dans la prière personnelle, si nous recourons aux sacrements de la confession et de l’Eucharistie, si nous fréquentons la Vierge Marie, les anges et les saints, qui sont nos intercesseurs auprès de Dieu, nous contribuerons en collaborateurs efficaces à cette pêche divine à laquelle le Seigneur Jésus veut que nous nous adonnions. Et pour cela, en suivant l’exemple du Maître, nous devons aimer sincèrement nos amis, nos camarades, toutes les âmes, en mettant en pratique le mandatum novum , le commandement nouveau du Sauveur : ainsi les gens reconnaîtront que nous sommes ses disciples (cf. Jn 13, 34-35).

D’autre part, le Seigneur désire que nous mettions aussi à son service les moyens matériels qui sont à notre portée. Nous pouvons le déduire de l’enseignement de la première lecture de la messe de saint Josémaria. Après avoir créé le monde par sa toute-puissance, et avec un amour tout particulier, le premier homme et la première femme, le Seigneur Dieu planta un jardin en Eden, à l’orient, et y plaça l’homme qu’il avait modelé (…) pour qu’il le travaille et le garde ( Gn 2, 8-15).

Ce passage de la Sainte Écriture était resté très prégnant dans l’esprit du fondateur de l’Opus Dei. À partir du moment où le Seigneur lui fit voir sa volonté, il comprit que dans ces paroles du livre de la Genèse se trouvait l’une des clés pour accomplir l’obligation de sanctifier le travail et de se sanctifier grâce au travail. Décisif à cet égard apparaît l’exemple de Jésus qui, durant trente ans, a mené à bien son travail dans l’atelier de Nazareth, mettant en évidence le devoir d’utiliser aussi les moyens humains pour l’instauration du royaume de Dieu.

Dans n’importe quelle activité apostolique il faut surtout compter sur l’aide de Dieu et, en même temps, utiliser les moyens matériels. Les initiatives de l’Opus Dei, par exemple, requièrent la prière et l’aide de beaucoup de gens. Et ainsi, avec la grâce de Dieu et la contribution généreuse de cette piété, du sacrifice et des aumônes de toute sorte de personnes de conditions sociales très variées, se développe un travail d’évangélisation de plus en plus large au service de l’Église dans le monde entier.

Saint Josémaria nous suggérait de nous demander tous les jours : qu’ai-je fait aujourd’hui pour approcher de Notre Seigneur quelques-unes de mes connaissances ? Selon les circonstances, nous actualiserons cette urgente nécessité par une conversation capable d’orienter quelqu’un ; par une invitation à recourir au sacrement de Réconciliation ; par un conseil qui aide à mieux comprendre un aspect de la vie chrétienne. A propos de Zacharie, père de Jean-Baptiste (cf. Lc 1, 64), qui avait retrouvé l’usage de la parole, saint Ambroise fait le commentaire suivant : « C’est avec raison que sa langue se délia, car la foi délia ce que l’incrédulité avait lié » [92] . La foi, si elle est vivante, nous délie la langue pour témoigner du Christ par l’apostolat d’amitié et de confidence. Et il y faut toujours l’offrande généreuse de la prière et de la pénitence personnelles, du travail bien achevé ; tels sont les instruments les plus importants que nous devons employer pour atteindre les objectifs apostoliques.

EN GUISE DE CONCLUSION

51. Avant de conclure, je vous propose trois objectifs, afin d’accroître, dans les prochains mois, votre "vie de foi" : piété eucharistique, fréquentation de l’Esprit Saint, dévotion envers la Très Sainte Vierge. Avec l’aide de la direction spirituelle, vous pourrez, chacun et chacune d’entre vous, les adapter à votre situation personnelle.

Piété eucharistique

52. Dans sa lettre apostolique Porta Fidei , Benoît XVI exprime ses souhaits pour l’ Année de la Foi : que celle-ci « suscite en tout croyant l’aspiration à confesser la foi en plénitude et avec une conviction renouvelée, avec confiance et espérance ». Et il précise : « Ce sera aussi une occasion propice pour intensifier la célébration de la foi dans la liturgie, et en particulier dans l’Eucharistie, qui est "le sommet auquel tend l’action de l’Église, et en même temps la source d’où découle toute sa force" ( Sacrosanctum Concilium , n° 10). En même temps, nous souhaitons que le témoignage de vie des croyants grandisse en crédibilité. Redécouvrir les contenus de la foi professée, célébrée, vécue et priée, et réfléchir sur l’acte lui-même par lequel on croit, est un engagement que chaque croyant doit faire sien, surtout en cette Année » 93 .

Durant l’année 2012, on a célébré, ou on célébrera certains anniversaires particulièrement significatifs de l’histoire de l’Opus Dei. Je pense au centenaire de la première Communion de saint Josémaria, le 23 avril ; au vingtième anniversaire de sa béatification (17 mai) et au dixième de sa canonisation (6 octobre) ; au trentième anniversaire de l’érection pontificale de la Prélature (28 novembre)… La préparation et le déroulement de l’ Année de la Foi nous aideront à renouveler, à l’occasion de ces anniversaires et d’autres fêtes de famille, notre gratitude envers la très Sainte Trinité, et notre louange. Et quel meilleur moyen d’y parvenir que le Sacrifice de Jésus-Christ, sacramentellement présent dans la sainte Messe ?

Tout au long de l’année de la foi, nous pourrons donc donner un nouvel élan à des manifestations de piété forte et solide envers la très Sainte Eucharistie, un mystère « qui renferme en lui-même tous les mystères du christianisme » [94] . Penchons-nous davantage et de tout notre cœur sur ces dons qui nous ont été accordés de par notre participation à l’unique sacerdoce du Christ : en effet, nous avons tous reçu, au baptême, le sacerdoce commun des fidèles ; d’autres, par l’ordination sacerdotale, ont reçu en outre le sacerdoce ministériel. Je vous invite à donner plus de relief à l’exercice de l’âme sacerdotale lorsque vous assistez à la sainte Messe ou la célébrez ; déposez chaque jour sur l’autel votre travail, vos aspirations, vos difficultés, vos peines et vos joies. Jésus-Christ les unira à son Sacrifice et offrira tout au Père ; il transformera les moments et les circonstances de notre cheminement sur la terre en offrande agréable à Dieu, et en fera ainsi un vrai sacrifice de louange, d’action de grâce, et de réparation pour nos péchés. L’aspiration que saint Josémaria nourrissait au plus profond de son cœur deviendra réalité : que toute notre existence, les vingt-quatre heures de la journée, en vertu de leur étroite union au Sacrifice de l’Autel, deviennent une messe.

53. Je vous invite à multiplier ces mois-ci vos actes de foi en la Présence réelle de Jésus-Christ dans l’Eucharistie. Avec quel amour et quelle profondeur notre Père évoquait le Très Saint Sacrement ! À chaque fois qu’il parlait, dans ses voyages de catéchèse, de ce trésor de l’Église, il en profitait pour faire un profond acte de foi. « Le Seigneur n’est pas seulement sur l’autel. Quand le prêtre réserve les espèces sacramentelles du Pain dans le tabernacle, là se trouve Jésus-Christ, le Fils de Sainte Marie toujours Vierge : celui qui est né de ses entrailles, qui est né à Bethléem, et a travaillé ensuite dans le silence à Nazareth, celui qui a prêché, a souffert sa Passion et est mort sur la Croix, celui qui est ressuscité et est monté aux Cieux » [95] .

Je vous ai encouragés, au début de l’année 2012, à redire la profession de foi de l’apôtre Thomas : Dominus meus et Deus meus ! ( Jn 20, 28). Je vous suggère également, lorsque vous contemplerez le Seigneur caché dans la Sainte Eucharistie, de lui dire comme saint Josémaria, avec ces paroles, ou d’autres : « Seigneur, je crois que c’est Toi, Jésus, le Fils de Dieu et de Marie toujours Vierge, qui es réellement présent : avec ton Corps, avec ton Sang, avec ton Âme, et avec ta Divinité. Je t’adore. Je veux être ton ami, parce que Tu es celui qui m’a racheté. Je veux être l’amour pour toi, parce que Tu l’es pour moi » [96] .

Mes filles et mes fils, c’est le propre d’un bon esprit de famille que de vouloir ressembler à un père si bon, saint Josémaria, en nous appliquant à parcourir fidèlement le chemin qu’il a tracé pour nous. Efforçons-nous de cultiver le saint désir d’être chaque jour plus délicat dans la piété eucharistique. Soyons amicalement prévenants envers Jésus lorsque nous le saluons dans le Très Saint Sacrement, en entrant et en sortant des Églises ou des oratoires de nos centres. Ne serait-il pas logique de lui adresser fréquemment des mots affectueux, qui viennent du cœur ? Nous pourrons le faire aussi depuis notre lieu de travail, en savourant des oraisons jaculatoires ou des communions spirituelles. Et apprenons à réparer, lorsque nous voyons ou entendons ce qui pourrait être une offense ou un manque d’attention. Voyons si nos génuflexions sont de vrais gestes d’adoration.

Ce sont de petites marques – il y en a bien d’autres – de cet amour eucharistique propre à ceux qui veulent être Opus Dei et faire l’Opus Dei.

Veni, Sancte Spiritus !

54. Invoquons avec foi et espérance le Paraclet, afin que les prodiges de la première Pentecôte se renouvellent de nos jours dans l’Église. Je pense que le profond changement opéré par l’Esprit Saint auprès des Douze nous remplit toujours d’admiration. Après s’être débarrassés de leurs craintes, ils se mirent à parcourir le monde, avec une audace confiante, pour parler du Christ à tous ceux qu’ils rencontraient. Lorsque survinrent des difficultés plus grandes, ils eurent recours à la prière, en s’appuyant fermement sur les paroles du Seigneur, qui avait promis une assistance particulière du Consolateur pour ces moments là (cf. Jn 14, 15-18 ; Lc 21, 12-15). C’est ce que rapportent les Actes des Apôtres : Comme leur prière se terminait, le lieu où ils étaient réunis se mit à trembler, ils furent tous remplis de l'Esprit Saint et ils annonçaient la parole de Dieu avec assurance (Act 4, 31 ).

Le Maître annonça aux Apôtres : quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière ( Jn , 16, 13). Le Paraclet inspira les apôtres jusqu’à la mort du dernier d’entre eux qui marqua la fin de la révélation opérée par le Christ. Ces paroles de Jésus nous indiquent en outre que l’assistance de l’Esprit de vérité n’a jamais manqué, ni ne manquera à l’Église de tous les temps, et en particulier au Magistère authentique. Le Consolateur lui-même conduit chacun d’entre nous, si nous avons recours à lui, vers une connaissance toujours plus profonde du mystère du Sauveur. Une connaissance qui est aussi amour, car la charité est répandue dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné (cf. Rm 5, 5).

55. Le Seigneur a promis également que l’Esprit dénoncerait au monde le péché de ceux qui ne croiraient pas au Christ (cf. Jn 16, 8-9). Il nous faut nous aussi en être persuadés, c’est-à- dire que nous devons croire davantage en Jésus, avoir davantage confiance en Lui, voir en Lui notre appui, notre joie, et non pas en nous-mêmes, en nos capacités ou en nos moyens.

Demandons au Sanctificateur de nous faire comprendre cette exigence afin d’éviter le risque de tomber dans le péché de ne pas croire complètement en Jésus ; et prions aussi le Paraclet de nous libérer, par son feu et sa lumière, de cette limitation, afin que notre foi et notre amour pour le Christ grandissent de plus en plus. Peut-être pouvons-nous méditer et savourer fréquemment – tous les jours, je dirais – cette oraison que notre Père composa au cours des années trente du siècle dernier : « Viens, ô Esprit Saint ! illumine mon entendement, pour que je connaisse tes commandements ; fortifie mon cœur contre les embûches de l’ennemi ; enflamme ma volonté... J’ai entendu ta voix, et je ne veux pas m’endurcir ni résister, en disant : plus tard…, demain. Nunc coepi ! Maintenant, au cas où demain ne serait pas ». « Ô, Esprit de vérité et de sagesse, Esprit d’intelligence et de conseil, Esprit de joie et de paix ! Je veux ce que tu veux, je veux parce que tu veux, je veux comme tu veux, je veux quand tu veux… » [97] .

Si nous méditons ces paroles, nous grandirons en intimité avec le Paraclet, et nous aurons besoin, comme l’écrivait saint Josémaria, de nous adresser à chaque Personne de la Trinité en distinguant chacune d'elles [98].

Supplions également le Sanctificateur de mettre dans nos paroles et dans nos actes ce feu qui est le sien et qui peut changer les âmes. Que notre désir soit vraiment d’être embrasés par sa flamme, afin de faire de l’apostolat partout. Prions avec la foi de saint Josémaria : « Ure igne Sancti Spiritus ! », embrase-nous, Seigneur, du feu de l’Esprit Saint.

La dévotion mariale

56. Le sommet de toutes les grandes figures de la sainte Écriture est la Très Sainte Vierge. Marie nous est offerte comme exemple emblématique pour comprendre que si l’on veut aimer Dieu et s’identifier à lui, il faut s’abandonner librement à sa Volonté et approfondir notre foi. L’Église nous la présente de manière spéciale au cours de l’Année de la foi : « Au cours de cette année, il sera utile d'inviter les fidèles à s'adresser avec une particulière dévotion à Marie, figure de l'Église, qui « rassemble et reflète en elle-même d'une certaine façon les requêtes suprêmes de la foi » ( Lumen gentium , n° 65). Il faut donc encourager toute initiative qui aiderait les fidèles à reconnaître le rôle particulier de Marie dans le mystère du salut, à l'aimer filialement et à suivre sa foi et ses vertus. À cet effet, il sera très opportun d'organiser des pèlerinages, des célébrations et des rencontres auprès des sanctuaires les plus importants » [99].

Nous pourrons commencer par nous réjouir de plus en plus, tout spécialement pendant cette période, de la célébration des mémoires liturgiques de Notre Dame que parcourt le calendrier ; je vous demande de les vivre comme de véritables fêtes de famille, à l’occasion desquelles les enfants, tout joyeux de célébrer l’anniversaire de leur Mère, l’honorent avec une affection délicate.

Lorsque nous rendrons visite à des sanctuaires ou des chapelles consacrées à Marie, accompagnés de nos parents, amis ou collègues, bien unis au saint-père, à ses collaborateurs et à tous les Pasteurs de l’Église, présentons-lui avec une attention toute spéciale notre propre personne et celle des autres afin que les intentions qui ont poussé Benoît XVI à convoquer cette Année de la foi se réalisent. Y a-t-il meilleure manière de manifester ces désirs à Dieu qu’en ayant recours à l’intercession de la Vierge Marie, qui est si intimement associée au Christ dans l’œuvre de la Rédemption ?

Ayons confiance en sa puissante médiation, et nous pourrons alors obtenir de la Trinité la grâce du retour vers Dieu du monde et de la société. À ce propos, rappelons-nous que notre Père insistait toujours sur l’importance de l’esprit de contrition, convaincu qu’il était que cette manière de prier était particulièrement adaptée aux limitations et aux manques de générosité des âmes, et en premier lieu des nôtres. Sachons réparer pour les omissions et offenses personnelles, pour celles du peuple chrétien, et pour celles de toute l’humanité.

57. En commentant le chant du Magnificat , Benoît XVI affirmait que « Marie désire que Dieu soit grand dans le monde, soit grand dans sa vie, soit présent parmi nous tous. Elle n'a pas peur que Dieu puisse être un "concurrent" dans notre vie, qu'il puisse ôter quelque chose de notre liberté, de notre espace vital, par sa grandeur. Elle sait que si Dieu est grand, nous aussi, nous sommes grands. Notre vie n'est pas opprimée, mais est élevée et élargie: ce n'est qu'alors qu'elle devient grande dans la splendeur de Dieu » [100].

Lorsque nous aurons recours à l’intercession sûre de la Toute-puissance suppliante , insistons avec persévérance auprès du Seigneur pour qu’il accorde de l’efficacité à nos efforts, aux nôtres et à ceux de tous les catholiques, en vue de la nouvelle évangélisation de la société. Cette année doit nous conduire, beáta María intercedénte , avec l’intercession de la Vierge Marie, à cela : réveiller chez de nombreuses personnes leur foi endormie ou blessée, et faire naître chez d’autres une foi qu’ils n’auraient pas encore. Profitons de toutes les occasions que nous avons de faire connaître le Christ et sa doctrine, et pour diffuser l’esprit de l’Opus Dei, afin de servir l’Église, au moyen d’un apostolat d’amitié et de confidence plus résolu ; de la sorte, de nombreux hommes et de nombreuses femmes, de toutes conditions, s’incorporeront au travail apostolique.

58. Examinons-nous chaque jour sur l’amour que nous mettons à faire que ces désirs deviennent réalité. Soyons sincères avec nous-mêmes pour évaluer la manière avec laquelle nous avons profité des différentes circonstances dans nos relations sociales – sans oublier les week-ends, les périodes de vacances, les temps de repos nécessaires – pour arriver plus loin , pour connaître et servir plus de gens ; en un mot : comment remplissons-nous les rues, et autres endroits, de prière apostolique, d’esprit de prosélytisme ?

La très sainte Vierge est Maîtresse de foi. « Comme le patriarche du Peuple de Dieu, Marie de même, "espérant contre toute espérance, crut" tout au long du chemin tracé par son fiat filial et maternel. De manière toute spéciale, au cours de certaines étapes de ce chemin, la bénédiction accordée à "celle qui a cru" sera manifestée avec une particulière évidence » [101] . Cette époque de l’histoire de l’Église, que nous sommes en train de vivre, doit être profondément marquée par la présence maternelle de Notre Dame. « Son pèlerinage de foi exceptionnel représente une référence constante pour l'Église, pour chacun individuellement et pour la communauté, pour les peuples et pour les nations et, en un sens, pour l'humanité entière » [102].

59. Après l’Ascension de Jésus au Ciel, les premiers disciples attendirent la venue de l’Esprit Saint dans le cénacle de Jérusalem, réunis autour de Marie. Prier avec la Vierge, avoir recours à son intercession, nous donnent la certitude d’être rapidement entendus. C’est la raison pour laquelle nous devons avoir recours à la Mère de Dieu, notre Mère, dans toutes les tâches apostoliques. Nous le lui redisons avec saint Josémaria :

« Sainte Marie, Regina apostolórum, reine de tous ceux qui aspirent ardemment à faire connaître l'amour de ton Fils, toi qui comprends si bien nos misères, demande pardon pour notre vie; pour ce qui, en nous, aurait pu être flamme et fut cendre; pour cette lumière qui a cessé d'éclairer, pour ce sel qui est devenu insipide. Mère de Dieu, toi qui obtiens tout ce que tu demandes, donne-nous, en même temps que le pardon, la force de vivre vraiment de foi et d'amour, pour pouvoir apporter aux autres la foi du Christ » [103].

Je vous bénis avec toute mon affection.

Votre Père

+ Xavier

Rome, 29 septembre 2012

[1] Benoît XVI, Lettre apost. Porta fidei , 11 octobre 2011, n 2.

[2] Saint Josémaria, Lettre, 24 octobre 1965, n° 4.

[3] Benoît XVI, Lettre apost. Porta fidei , 11 octobre 2011, n 3.

[4] Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note pastorale, 6 janvier 2012, III, 3.

[5] Ibid . II, 5.

[6] Vénérable Álvaro del Portillo, Lettre , 25 décembre 1985, n° 4.

[7] Saint Josémaria, Lettre , 28 mars 1973, n° 18.

[8] Bienheureux Jean-Paul II, Exhort. Apost. Ecclesia de Europa , 28 juin 2003, n° 46.

[9] Ibid. [10] Saint Josémaria, Instruction , mai-1935/14-IX-1950, note 231.

[11] Bienheureux Jean-Paul II, Exhort. Apost. Ecclesia de Europa , 28-VI-2003, n 47.

[12] Saint Josémaria, Lettre , 28-III-1973, n 4.

[13] Saint Josémaria, Lettre , 19-III-1954, n 27.

[14] Saint Josémaria, Amis de Dieu , n 186.

[15] Bienheureux Jean-Paul II, Discours, 9-IX-1995.

[16] Saint Josémaria, Lettre , 24-X-1965, n 13.

[17] Saint Justin, Apologie 2, 10 (PG 6, 462).

[18] Minucius Felix, Octavius , n 38 (PL 3, 357).

[19] Bienheureux Jean-Paul II, Lettre apost. Tertio millenio adveniente , 10-XI-1994, n 6.

[20] Saint Josémaria, Notes prises lors d’une réunion de famille, 7-IV-1974.

[21] Benoît XVI, Homélie , 21 août 005.

[22] Ibid. [23] Saint Augustin, Confessions , I, 1, 3 (CCL 27, 1)

[24] Saint Josémaria, Notes prises lors d’une réunion de famille, 2 juin 1974.

[25] Benoît XVI, homélie en la solennité de l'Épiphanie, 6 janvier 2007.

[26] Saint Josémaria, Quand le Christ passe , n° 33.

[27] Bienheureux Jean-Paul II, Entrez dans l'espérance , p. 178 . [28] Saint Josémaria, discours prononcé lors de l'acte d'investiture de docteurs "honoris causa" de l'Université de Navarre, 7 octobre 1967.

[29] Saint Josémaria, Chemin , n° 944.

[30] Saint Josémaria, discours prononcé lors de l'acte d'investiture de docteurs «"honoris causa" de l'Université de Navarre, 9 mai1974.

[31] Bienheureux Jean-Paul II, lettre encyclique Fides et ratio , 14 septembre 1998, n° 17.

[32] Saint Josémaria, Lettre, 9 janvier 1951, n° 12

[33] Bienheureux Jean-Paul II, lettre apostolique Novo millénnio ineúnte , 6 janvier 2001, n° 51.

[34] Benoît XVI, discours à un groupe de parlementaires européens, 30 mars 2006.

[35] Ibid. [36] Vénérable Álvaro del Portillo, Lettre , 1er janvier1994.

[37] Saint Josémaria, Chemin , n° 493.

[38] Saint Grégoire de Nazianze, Oratio II , n 71 (PG 35, 479) ; in Bienheureux Jean-Paul II, Exhort. Apost. Pastóres gregis , 16 octobre 2003, n° 12.

[39] Saint Josémaria, Lettre, 28 mars 1973 , n° 10.

[40] Benoît XVI, Discours aux assistants d'un cours sur le for interne organisé par la Pénitencerie apostolique, 9 mars 2012.

[41] Saint Josémaria, Chemin , n° 121.

[42] Saint Josémaria, notes prises lors d'une réunion de famille, 20 mai 1973.

[43] Saint Josémaria, Amis de Dieu , n° 26.

[44] Ibid. , n° 27.

[45] Benoît XVI, Lettre apostolique. Porta fídei , 11 octobre 2011, n° 6.

[46] Missel Romain, Prière Eucharistique I.

[47] Bienheureux Jean-Paul II, Lettre sur le pèlerinage vers les lieux liés à l’histoire du salut , 29 juin 1999, n° 5.

[48] Benoît XVI, Lettre apostolique Porta fídei , 11 octobre 2011, n° 13.

[49] Ibid. [50] Saint Josémaria, Instruction , 19 mars 1934, n° 45.

[51] Saint Josémaria, Forge , n° 235.

[52] Benoît XVI, Lettre apostolique. Porta fídei , 11 octobre 2011, n° 9.

[53] Ibid. [54] Ibid. , n° 10

[55] Ibid. [56] Saint Josémaria, Quand le Christ passe , n° 44.

[57] Saint Josémaria, Lettre , 9 janvier1959, n° 34.

[58] Benoît XVI, homélie des vêpres de la solennité de la conversion de l’apôtre Paul, 25 janvier 2006.

[59] Saint Josémaria, Lettre , 9 janvier 1959, n° 34.

[60] Saint Josémaria, Notes d'une réunion de famille, 6 mai1968.

[61] Saint Josémaria, Notes d'une méditation, 21 octobre 1954.

[62] Bx Jean-Paul II, Audience générale, 24 avril 1991.

[63] Ibid. [64] Saint Josémaria, Lettre , 6-V-1945, n° 35.

[65] Saint Anselme, Proslógium, proem. (PL 158, 225) . [66] Benoît XVI, Audience générale 21 mars 2007.

[67] Ibid. [68] Ibid. La citation de Tertullien se trouve dans Du voile des vierges , I, 1 (PL 2, 889).

[69] Ibid. [70] Saint Ignace d’Antioche, Lettre aux Romains IV, 1 (Funk I, 216).

[71] Saint Josémaria, Forge , n° 518.

[72] Benoît XVI, Homélie , 26 mars 2006.

[73] Saint Josémaria, Notes prises pendant une méditation, 28 mai 1964.

[74] Saint Josémaria, Chemin , n° 81.

[75] Saint Josémaria, Lettre , 31 mai 1954, n° 29.

[76] Bienheureux Jean-Paul II, Lettre apost. Tértio millénio adveniénte , 10 novembre 1994, n° 45.

[77] Ibid. [78] Saint Josémaria, Lettre à Isidoro Zorzano , 23 novembre 1930.

[79] Bienheureux Jean-Paul II, Homélie pour la canonisation de saint Josémaria , 6 octobre 2002.

[80] Saint Josémaria, Lettre à Isidoro Zorzano , 23 novembre 1930.

[81] Saint Josémaria, 28 juillet 1930, in Notes intimes , n° 75.

[82] Saint Josémaria, Lettre , 9 janvier 1932, n° 83.

[83] Saint Josémaria, Saint Rosaire , quatrième mystère joyeux.

[84] Ibid. , troisième mystère douloureux

[85] Saint Josémaria, Lettre du 29 septembre 1957, n° 16

[86] Saint Jean Chrysostome, Homélie sur l' Évangile de saint Matthieu.

[87] Saint Jean Chrysostome, cit. i n saint Thomas d'Aquin, Somme théologique , III, q.40, a.1., ad. 2.

[88] Saint Jean Chrysostome, Homélie sur l' Évangile de saint Matthieu.

[89] Bienheureux Jean-Paul II, Lettre apost. Novo millénnio ineúnte , 6 janvier 2001, n 1.

[90] Ibid. [91] Benoît XVI, Homélie de la messe inaugurale du pontificat, 24 mai 2005.

[92] Saint Ambroise, Sur saint Luc , II, 32.

[93] Benoît XVI, Lettre apostolique Porta fidei, 11 décembre 2011, n° 9.

[94] Saint Josémaria, Entretiens... , n° 113.

[95] Saint Josémaria, Notes d’une réunion de famille, 11 novembre 1972.

[96] Saint Josémaria, Notes d’une réunion de famille, 22 novembre 1972.

[97] Saint Josémaria, Oraison manuscrite, année 1934.

[98] Cf. Saint Josémaria, Amis de Dieu , n° 306.

[99] Congrégation pour la doctrine de la foi, Note pastorale, 6 janvier 2012, I, 3.

[100] Benoît XVI, Homélie pour la solennité de l’Assomption, 15 août 2005.

[101] Bienheureux Jean-Paul II, Lettre Enc. Redemptóris Mater , 25 mars 1987, n° 14.

[102] Ibid ., n° 6

[103] Saint Josémaria, Quand le Christ passe , n° 175